Elections. Le pouvoir à tout prix 
L'influence familiale est devenue l'une des expressions du processus électoral au Maroc

Drôles de sagas familiales : Des familles entières sont candidates aux prochaines élections législatives au sein d’une même liste ou de listes différentes. Rien dans la loi ne l'interdit, mais pour les partis politiques cela confirme l'emprise familiale.

Il y a le père, les fils, les filles, les frères, les neveux... Huit membres de la famille « Aba » sont candidats aux prochaines élections à la fois législatives et régionales dans différentes listes à Boujdour sous les couleurs du parti de l’Istiqlal. Et ils ne sont pas les seuls. A Es-Semara, cinq autres membres de la même famille « Hnini », se sont présentés dans différentes circonscriptions électorales. A Fès, les « Chabat » reviennent en force. Le père, Hamid, qui après avoir acté son divorce avec le parti de l’Istiqlal et rejoint le front des forces démocratiques, n’est pas le seul à avoir déposé sa candidature pour reconquérir la mairie de Fès. Son fils, sa fille et sa femme livreront bataille dans différentes circonscriptions électorales dans la région Fès-Meknès pour décrocher des sièges au parlement.

Une démarche légale mais...

« Aucune disposition du code électoral n'interdit à plusieurs membres d'une même famille de se présenter au titre des mêmes élections législatives et régionaux que ce soit au sein d'une même liste ou de listes différentes », explique le politologue Mohamed Marzouk qui tient à souligner par ailleurs que le phénomène ne date pas d’aujourd’hui. «Cette pratique a toujours existé, mais elle passait presque inaperçue. Le digital, a permis de la révéler au grand jour », estime le spécialiste. De son côté, l’analyste politique et professeur à l’université Mohammed V à Rabat, Adelmounim Lazar parle d’une transmission familiale politique. « Toutes les expériences électorales témoignent de la présence de familles politiques, jusqu'à ce que l'influence familiale soit devenue l'une des expressions du processus électoral et l'un des facteurs qui l'affectent », souligne t-il avant d’ajouter que « cette catégorie est devenue une des clés du jeu électoral au Maroc. Faire du travail politique et électoral est pour ces personnes un métier ou même un projet »,

Préserver les privilèges d’abord

« La compétition électorale est devenue davantage centrée sur les personnalités politiques que sur les partis politiques, une tendance qui motive les familles politiques à s'enraciner davantage dans le sol de l'acte électoral dans la mesure où il existe des familles politiques plus fortes que les partis politiques», note Lazar. Selon lui, l'émergence des familles politiques suit un cheminement bien tracé. Tout commence par le dépôt d’une candidature individuelle dans la ville natale ou le lieu de résidence. « Une fois, élu, il y a cette obsession de la préservation des privilèges et avantages que procure «le nouveau poste » qui hante l’acteur politique, pour qui la participation électorale devient « plus professionnelle ». Tous les moyens sont alors déployés pour assurer la pérennité du « poste ». L'acteur, travaille d’arrache pied, étape par étape, pour une seule finalité: transmettre tout ce dont il a bénéficié à ses fils ou à d'autres membres de la famille par la voie de l’héritage politique ».