Maroc-UE. Juristes et intellectuels européens dénoncent la décision de leur Cour de justice
Me Hubert Seillan (à gauche) et Jérôme Besnard

La décision rendue hier, 29 septembre, par le tribunal de l’UE visant l’annulation des accords de pêche et agricole de cette Union avec le Maroc ont provoqué un tollé général. En plus des députés européens, des juristes et des intellectuels dénoncent eux aussi l’impartialité de ce tribunal. 

Avocat au barreau de Paris, Hubert Seillan est docteur d’Etat en droit et sait donc de quoi il parle. Pour lui, les juristes, convaincus que la méthode du droit, fondée sur l’analyse des faits et le contradictoire, doit primer toute considération contextuelle, pouvaient espérer du Tribunal de l’Union européenne, une décision consacrant la légalité des accords tarifaires conclus entre l’UE et le Maroc, sur des motifs rigoureux. «Cette espérance a été ensevelie sous une avalanche de déclarations, dont aucune n’a valeur de démonstration en raison du refus de discussion des arguments développés par le Conseil et la Commission », relève-t-il.

Il regrette de voir le Tribunal de Luxembourg « manier la technique pourtant dangereuse du syllogisme ». Hubert Seillan donne comme preuves de cette dérive le fait d’abord que le polisario ait pu ester en justice alors qu’il n’est pas un sujet de droit international. Il s’étonne ensuite du raccourci pris par la juridiction européenne qui a estimé que les accords objet de sa décision affectent le peuple du Sahara, comme si le polisario en était le représentant légal et devait à ce titre donner son consentement aux accords.

Autre syllogisme relevé par le juriste Hubert Seillan, celui du critère des bénéfices que la population tire de ces accords. Pour cet avocat, ce critère n’a aucune signification. Face aux faux arguments avancés, il rappelle aux magistrats du tribunal européen que les dernières élections qui viennent de se dérouler au Maroc, le 8 septembre courant, sont la démonstration la plus concrète et tangible du consentement du peuple sahraoui pour lesdits accords.

Et Me Seillan de conclure : « appel sera formé devant la Cour. Ce jugement va donc rejoindre sur la même étagère poussiéreuse, les autres décisions hostiles au Maroc, au Conseil et à la Commission, de la justice de l’Union. Ces accords vont donc se poursuivre dans la légalité. Viendra le temps ou les juges regarderont les réalités des enjeux et de l’adhésion du peuple au développement du Sahara ».

Abondant dans le même sens, le journaliste et écrivain français Jérôme Besnard déplore que «la justice de l’Union européenne se range aux arguments d’une organisation armée illégitime plutôt que de rendre justice aux intérêts économiques de ses pays membres et en premier lieu de l’Espagne et de la France ». Il en déduit que c’est là « une nouvelle preuve de l’urgence de réformer en profondeur les institutions européennes. »