Israël-Turquie. Le grand virage d'Erdogan
Isaac Herzog et Recep Tayip Erdogan. Les temps on bien changé

Isaac Herzog en Turquie, chez le président islamiste, ennemi juré d’Israël, Erdogan est un événement qui a son importance historique. Après avoir bâti sa renommée et surtout son pouvoir sur le soutien au « peuple palestinien » le président turc change complètement de direction. La seule façon de sauver son pays du désastre économique? Peut-être.

Pourquoi Erdogan s’est-il retourné contre lui-même et inviter le président israélien Herzog? En 2018, il avait rompu les relations de son pays avec l’Etat hébreu pour protester contre la mort de 60 Palestiniens lors de manifestations à la frontière de Gaza. Depuis, c’est la rupture.

Mais pas totale.

Le commerce a continué à prospérer. Les échanges qui étaient de 5 milliards de dollars en 2019 et 2020, ont fait un bond à 6,7 milliards en 2021.

La coopération militaire n’avait pas non plus cessé et la Turquie n’aurait jamais pu développer le drone dont elle est si fière sans la contribution d’Israël.

Les Israéliens n’ont jamais cessé de visiter la Turquie en touristes et les Turcs n’ont jamais cessé de visiter Israël. La position du président Erdogan, franchement anti-israélienne ne paraissait que dans ses discours belliqueux.

Le retour à des relations politiques normales veut-il dire qu’Erdogan a atteint ses objectifs en soutenant les Palestiniens, en fait juste les islamistes du Hamas? On le voit bien, les Palestiniens sont toujours dans la même situation, toujours divisés, avec une élite qui vit dans l’opulence et le reste de la population vivant dans la misère, ce qui leur a fait perdre beaucoup de crédibilité et de sympathie.

Alors que s’est-il vraiment passé pour que le président turc change radicalement de position? La guerre en Russie y est pour quelque chose, Erdogan veut aider l’Europe à se procurer du gaz, en cas de fermeture des gazoducs russes. Une manière de dire aux Européens que la Turquie mérite sa place dans l’Union européenne qui n’en veut toujours pas.

Il y a aussi le fait que, sur le terrain de la politique interne, le président turc s’est aperçu que le thème de la Palestine n’est plus rentable et que plusieurs pays arabes et islamiques ont bien changé vis-à-vis de cette question, alors que l’Iran a récupéré le « leadership » turc dans ce domaine.

On peut aussi penser qu’en se réconciliant avec Israël, Erdogan chercherait à s’attirer les bonnes grâces de Washington ce qui lui permettrait de résoudre la profonde crise économique dans laquelle il a engouffré son pays.

Toutefois, on l’a remarqué, Erdogan a pris un air contraint dans les photos officielles de la visite du président israélien. Il pensait peut-être à ses protégés du Hamas et aux islamistes en général pour le tour qu’il venait de leur jouer. Après tout pourquoi pas.