Chronique judiciaire. La banquière et le ripou
Capture d'écran de la vidéo montrant les deux protagonistes

Dans cette affaire, on va voir comment des dispositions de loi fragilisent certaines personnes et offrent à d’autres l’occasion d’escroquer les premières grâce à des doses de chantage bien administrées. Quand, en plus, les escrocs détiennent une force qui leur donne une impression d’impunité, les victimes sont prises dans le piège.

L’histoire se passe à Tiznit, à 80 Km au sud d'Agadir. Les deux protagonistes sont une directrice d’agence bancaire et un commissaire de police officiant à Agadir.

La jeune directrice est divorcée avec une fille, le commissaire a pu la séduire et établir avec elle une relation intime. Mais c’était visiblement pour une raison bien précise. Il prenait soin de filmer leurs ébats, évidemment à l’insu de la concernée, pour pouvoir la faire chanter plus tard. Ce qu’il a d’ailleurs fait sans ménagement.

Il aurait ainsi dépouillé la malchanceuse qui a dû vendre sa maison, ses bijoux puis sa voiture pour faire cesser le chantage et préserver sa réputation. Sauf que le commissaire, fort de son pouvoir policier et des vidéos en sa possession est apparu vorace, il voulait toujours plus.

Selon des indiscrétions locales, il aurait retiré de son doux commerce la somme de 2,8 millions de dirhams. Plus un autre pactole estimé à 800.000 Dirhams. N’ayant plus rien à vendre pour satisfaire son amant, la jeune directrice n’avait plus d’autre choix que de puiser dans la caisse de la banque.

Pratique n’a pas échappé à la Brigade nationale de police judiciaire qui a lancé une enquête. Et c’est cette enquête qui allait révéler les dessous de l’affaire.

C’est ainsi que la remise des 270.000 DH au commissaire, samedi dernier allait être enregistrée par une caméra dissimulée dans le bureau de la directrice. Cette vidéo circule actuellement sur les réseaux sociaux. On y voit le commissaire prendre possession de la somme exigée, de manière très virile, devant la directrice qui paraissait terrorisée et sans moyens devant le puissant personnage.

Le fonctionnaire de police aurait pu continuer son business longtemps encore. Il exploitait à son profit deux points faibles des femmes dans la société. Premièrement, les relations sexuelles hors mariage sont interdites et sévèrement sanctionnées par la législation marocaine.

Deuxièmement, la loi ôte la garde des enfants à la femme si le mari peut prouver qu’elle prend des libertés avec ses moeurs. Et il ne s’agit pas uniquement d’actes physiques rapportés de manière claire et inattaquable. Il suffit que la femme publie des photos, des textes ou des audios à connotation sexuelle ou juste sensuelle, pour qu’elle perde la garde de ses enfants. La pression sociale s’ajoute à ces deux dispositions légales pour finir de ligoter la femme, ne lui laissant aucune chance.

Personne ne connaît ces dispositions que le personnel de la justice et de la police. Le commissaire de l’histoire de Tiznit en a largement profité.

Le Bureau national de lutte contre les crimes économiques et financiers de la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) a transféré le dossier au procureur de la Cour d’Appel de Marrakech, après terminé l’enquête préliminaire. En attendant, la Direction générale de la sûreté nationale a suspendu temporairement le commissaire, dans l’attente de l’issue judiciaire.