France. Pourquoi Macron va gagner

Par Ahmed Charai

En tant que citoyen marocain, francophile, je suis assidûment les débats politiques en France. Disons-le, de l’aveu même des candidats, la campagne n’a pas été très riche.

A cela il y a des raisons objectives. Le président sortant avait à gérer d’énormes crises successives et ne pouvait se présenter et mener une campagne acharnée.

Après un quinquennat de crises, le candidat réformateur de 2017 se veut aujourd’hui protecteur, sans renier ses fondamentaux en matière de libéralisme économique. Il souhaite « poursuivre ce qui a été commencé » sur plusieurs chantiers, impulsés depuis 2017, comme la réforme du marché du travail et de l’assurance-chômage, afin d’atteindre «le plein-emploi».

Emmanuel Macron a donné des gages, encore plus ces dernières semaines, sur le plan social, pour compenser la retraite à 65 ans, mesure qu’il sait impopulaire. Il s’engage à valoriser les retraites, à recruter 50.000 personnes pour l’hôpital.

Le président sortant, candidat à sa réélection, vient d'orienter sa campagne à gauche toute lors de son seul meeting tenu samedi 2 avril. Un tournant, alors que seules ses mesures classées à droite, comme la retraite à 65 ans ou la réforme du RSA, avaient jusqu'à présent percé le mur du son médiatique et marqué l'opinion publique.

C'est d'ailleurs au cours de ce rassemblement conçu comme une démonstration de force qu'Emmanuel Macron a eu un clin d'œil à la gauche. La figure de François Mitterrand a été convoquée à travers son célèbre slogan de campagne de 1981, «la force tranquille», pour évoquer un thème cher à la gauche : l'égalité. «Face à un monde fou (...), où les milliards vont encore trop souvent aux milliards et la pauvreté trop souvent à la pauvreté, il n'y a pas plus puissant que le goût de l'égalité», a lancé Emmanuel Macron.

Le chef de l'Etat n'a pas fait que dans la symbolique et les références historiques. Les thèmes abordés, à travers les propositions de son programme, penchent davantage vers la gauche. Prime pour les salariés dès cet été jusqu'à 6.000 euros, pension minimale pour les retraités à 1.100 euros, mais aussi mesures pour les mères seules et priorité donnée à la santé et à l'éducation. Emmanuel Macron endosse la figure du protecteur, assurant qu'il ne se «résoudra jamais» aux injustices

Le Bloc dit d’extrême droite ne présente, selon les sondages, que le tiers des électeurs. Éric Zemmour, avec ses excès, a polarisé l’attention. Mais c’est vite retombé, parce qu’il réduit toutes les problématiques à celle de l’immigration.

Trop simpliste à bien des égards, selon les français. Ceux-ci sont plus concernés par le pouvoir d’achat, la justice sociale, mais aussi le redémarrage de l’économie.

Jean-Luc Mélenchon est cohérent avec son parcours, mais son discours anti-riches, ses propositions fiscales, ses relations avec les autres gauches sont des difficultés insurmontables. La gestion de la Covid a, au final, été bonne, malgré quelques retards à l’allumage. La gestion des impacts socio-économiques a été brillante, courageuse. «En cramant la caisse», comme dit Pécresse, son «coûte que coûte» a permis à l’appareil productif d’être prêt à redémarrer. Ce qu’il a fait, le taux de chômage tombant à un niveau historiquement bas.

Enfin, dans la crise ukrainienne, il a remis la France au centre du jeu, ferme sur les principes, mais sans rompre les canaux de négociation avec la Russie.

Pour toutes ces raisons, le bloc central de la société française, quelles que soient les divergences mineures, votera la reconduction de Macron et il aura bien raison de le faire..