TICAD à Tunis. Implosion et effet boomerang
Des chefts d'Etat africains dont le Président sénégalais ont exprimé leur colère...

Sans surprise, à cause de l’injustifiable manœuvre de la présidence tunisienne, le 8e Sommet de la TICAD est un rendez-vous raté. Seul fait marquant et au grand dam de la présidence tunisienne qui a versé dans un rétropédalage inutile, le principal sujet de débat a été le Maroc.

Les représentants des pays africains ayant fait le déplacement à Tunis pour participer à la conférence de la Ticad ont unanimement regretté l’absence du Maroc à ce rendez-vous devenu un non-évènement à cause de la place y ayant été faite, unilatéralement, par la présidence tunisienne au chef des miliciens du polisario.

Ainsi, le Président de la Guinée Bissau et président en exercice de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), Umaro Sissoco Embalo a quitté la conférence en signe de protestation contre la présence de ce participant indésirable.

Cette décision est révélatrice du ras-le-bol d'un grand nombre de pays africains contre l’acte inadmissible de la Tunisie. Le Sénégal, entre autres, a regretté à l’ouverture du Sommet par la voix de son Président Macky Sall, qui est le président en exercice de l'Union africaine, que ce rendez-vous soit marqué par l’absence du Maroc, en rappelant que le Royaume est un éminent membre de l’Union africaine. S'exprimant à l'ouverture du Sommet, le ministre libérien des Affaires étrangères, Dee-Maxwell Saah Kemayah a affirmé que son pays appelle à "la suspension de cette session jusqu'à résolution des problèmes relatifs aux procédures" après l'invitation unilatérale de l'entité séparatiste du "polisario" à cet événement. "Le Liberia fait part de son regret quant à l'absence du Maroc de la TICAD-8. On est surpris de la présence imposée d'une délégation (NDRL polisario) en violation des procédures de la TICAD", a-t-il déclaré en insistant sur l'obligation de respecter les procédures et les règles d'invitation établies dans le cadre du Ticad.

Pour rappel, le Maroc a décidé de ne pas participer au Ticad-8, qui se tient les 27 et 28 août à Tunis, et a rappelé son ambassadeur en Tunisie «suite à l’attitude de ce pays dans le cadre du processus du forum de coopération Japon-Afrique qui vient confirmer de manière flagrante son hostilité à l’encontre du Royaume».

Macky Sall a émis l’espoir de voir ce problème «trouver une solution durable dans l'avenir». Le Président sénégalais a lié la résolution de ce problème à la bonne marche de la Ticad et du partenariat Japon-Afrique.

De son côté, le Président des Iles Comores, Azali Assoumani a regretté l'absence du Maroc qu’il a présenté comme «un pilier de l'Afrique». Lui aussi a formulé le souhait que cela n'affectera pas les attentes des peuples africains dans le partenariat stratégique entre l'Afrique et le Japon.

Rétropédalage

La présidence tunisienne a tenté de justifier l’injustifiable à travers le communiqué publié, vendredi 26 août, par son ministère tunisien des Affaire étrangères. Ce communiqué contient de nombreuses approximations et contrevérités», indique samedi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger. «Loin de lever les ambiguïtés qui entourent la position tunisienne, il n’a fait que les approfondir», précise le porte-parole du ministère.

La TICAD ne constitue pas une réunion de l’Union Africaine, mais un cadre de partenariat entre le Japon et les pays africains avec lesquels il entretient des relations diplomatiques, ajoute la même source, précisant que la TICAD fait, ainsi, partie des partenariats africains, comme il en existe avec la Chine, l’Inde, la Russie, la Turquie ou encore les États-Unis, et qui ne sont ouverts qu’aux États africains reconnus par le partenaire.

En conséquence, les règles de l’Union Africaine et son cadre de travail, que le Maroc respecte entièrement, ne s’appliquent pas en l’occurrence, souligne-t-on.

Concernant l’invitation de l’entité séparatiste à la TICAD-8, le porte-parole du ministère tient à préciser qu’il a été convenu dès le départ et avec l’accord de la Tunisie, que seuls pourront prendre part à cette rencontre, les pays ayant reçu une invitation cosignée par le Premier Ministre Japonais et le Président tunisien.

Une note verbale officielle diffusée par le Japon, le 19 août 2022, souligne explicitement que cette invitation cosignée est «l’unique et authentique invitation sans laquelle aucune délégation ne sera autorisée à participer à la Ticad 8», en précisant que «cette invitation n’est pas destinée à l’entité mentionnée dans la note verbale du 10 août 2022», c’est-à-dire l’entité séparatiste, précise-t-on de même source, ajoutant que c’est dans ce cadre que 50 invitations ont été envoyées aux pays africains qui ont des relations diplomatiques avec le Japon et que la Tunisie n’avait donc pas le droit d’établir un processus d’invitation unilatérale, parallèle et spécifique à l’entité séparatiste, contre la volonté explicite du partenaire japonais.

Le porte-parole du ministère souligne en outre que le communiqué de la Tunisie fait preuve de la même approximation sur la position africaine. Cette position a toujours été fondée sur une participation inclusive des Etats africains, et non pas des membres de l’UA. Elle est fondée sur la Décision 762 du Sommet de l’UA, qui précise que le cadre de la Ticad n’est pas ouvert à tous les membres de l’UA, et que le format est défini par la même décision et par les arrangements avec le partenaire.

Pour ce qui est du fond de la neutralité et de la référence du Communiqué au "respect des résolutions des Nations Unies" par rapport à la question du Sahara, il a relevé que l’abstention surprenante et inexpliquée de la Tunisie lors de l’adoption de la résolution 2602 du Conseil de Sécurité, en octobre dernier, jette un doute sérieux et légitime sur son soutien au processus politique et aux résolutions des Nations Unies.

Par rapport, enfin, à l’accueil réservé par le chef de l’Etat tunisien au chef de la milice séparatiste, le porte-parole a noté que la référence obstinée du communiqué tunisien à «l’accueil des invités de la Tunisie sur un pied d’égalité» suscite la plus grande surprise, sachant que ni le gouvernement tunisien ni le peuple tunisien ne reconnaissent cette entité fantoche. Il témoigne d’un acte d’hostilité aussi flagrante que gratuite, et qui n’a rien à voir avec la «tradition d’hospitalité tunisienne» qui, en tout état de cause, ne peut en aucun cas s’appliquer aux ennemis des frères et amis qui ont toujours été aux côtés de la Tunisie dans les moments difficiles.