Ligue arabe. Le régime militaire d'Alger a tout torpillé et cela s'explique
Organiser le sommet à Alger était déjà un probème

Rien de ce qui s’est passé à Alger, n’était complètement imprévisible. Lors des deux jours de la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays de la Ligue arabe, il s’est passé tellement de bizarreries qu’on se demande pourquoi persister à organiser le sommet les 1 et 2 novembre. Tout était clair. Le monde a pu voir à quel point l’Algérie s’est éloignée des préoccupations des pays arabes. Tout s'explique.

Alors que les pays arabes font face à une agressivité meurtrière de l’Iran, l’Algérie refuse de condamner le pays des Mollahs dont le trône commence déjà à vaciller. Comment interpréter l’attitude de l’Algérie? Pour qui rampe-t-elle?

D’une part, dans le discours, elle prétend vouloir rassembler les pays arabes. D’autre part, dans les faits, elle agit tout à fait dans le sens opposé de cette belle intention. Il fallait d’ailleurs s’y attendre. Comment un pays qui n’arrive pas à rassembler ses citoyens peut-il rassembler les autres? Un non sens. Mais on a appris à nager loin du bon sens avec la junte militaire en faction à Alger.

L’Algérie fantasme toujours sur cette « puissance régionale » qu’elle n’atteint que dans les paroles de ses dirigeants et les éditoriaux de sa revue politico-militaire El Djeich. Puissance régionale qui a court-circuité la Ligue arabe en montant de toute pièce un semblant de réconciliation palestinienne, pour s’en accaparer les mérites.

Le président, toujours en mal de légitimité ne voulait pas autre chose que montrer au peuple algérien qu’il est un vrai président et qu’il a le bras long. Même si les citoyens voient bien que leur situation économique est déplorable, qu’importe, le président est un grand homme. Et c’est lui qui commande. On sait que c’est faux et que ce président est toujours sous la coupe des généraux qui ont consenti à lui laisser juste un peu d’air pour qu’il respire, sans toutefois dépasser les limites. Ils avaient enfin compris qu’il fallait donner une image d'un pays bien gouverné. Le pétrole et la révolution algérienne vont leur faciliter l’affaire.

Une affaire de rentes

Hocine Malti, écrivait, dans Algeria Watch, le 5 septembre dernier ceci: « Les dirigeants civils et militaires algériens savent qu’ils ne sont pas aimés du peuple, vu qu’ils ne sont arrivés au pouvoir que par des coups d’État ou par des élections frauduleuses. Aussi cherchent-ils à se légitimer en s’auto-déclarant héritiers de la révolution algérienne. Ils se sont attribués la symbolique de la révolution et le puissant message qu’elle a délivré à la planète entière. Les militaires le proclament ouvertement. Les officiers supérieurs (généraux, généraux-majors, etc.), ceux qui dirigent l’armée, cultivent fièrement ce qu’ils considèrent être un mythe, à savoir que l’ANP, c’est-à-dire eux, est la « digne héritière » de l’ALN (Armée de libération nationale) ».

C’est la rente mémorielle dont parlait le président français et qui avait si horriblement fâché les dirigeants. Pour que cette rente perdure, il lui faut des resources. C’est pourquoi « la nomenklatura utilise les revenus pétroliers pour s’acheter des soutiens et des consciences dans le pays et à l’étranger et pour s’enrichir en piochant autant que faire se peut dans la rente pétrolière », analysait Hocine Malti. Une rente nourrit l’autre.

Celui qui a dit cela n’est pas n’importe qui. Hocine Malti est un ingénieur des pétroles qui a participé à la création de la Sonatrach. Il en était vice-président de 1972 à 1975. Il était aussi Conseiller du secrétaire général de l’OPAEP (Koweït) de 1975 à 1977, puis directeur général de l’Arab Petroleum Services Company (Tripoli) jusqu’en 1982.

Consultant pétrolier, H. Malti a écrit un livre, en 2012 déjà, pour expliquer comment les dirigeants algériens se sont accaparé la manne pétrolière pour garnir leurs comptes en banque et acheter le silence des grandes démocraties, y compris la France. Tiens !

« La principale richesse de l’Algérie, son pétrole et son gaz, n’est plus source de bonheur pour son peuple. La volonté d’accaparement de la rente pétrolière par ses dirigeants a plongé des pans entiers de la société dans la misère, tandis que les jeunes n’ont qu’une envie : quitter le pays », explique-t-il.

Et pourtant, ce sont ces dirigeants qui veulent rassembler des pays comme les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, le Qatar, le Maroc, le Koweit, l’Egypte, le Bahrein, tous des pays qui gèrent au dollar près leurs ressources naturelles.

Dans ce contexte, que peut-on attendre du sommet de la Ligue arabe? Pas grand-chose en fait. L’Algérie a montré qu’elle cherchait les intérêts d’autres parties, hostiles à plusieurs pays arabes. Son refus de condamner l’Iran en est la preuve. Pourtant, les pays arabes savent pertinemment qui est leur véritable ennemi. La normalisation avec Israël n’est pas une saute d’humeur ni un acte précipité.