Sexologie. Ces  Marocains adeptes du fétichisme
Le fétichisme satisfait les désirs "atypiques" des amateurs, mais est-il pour autant "safe" ?

Le fétichisme séduit de plus en plus de Marocains. Les applications et les sites de rencontre sont remplis d’annonces fétichistes. Signe d’ouverture et d’épanouissement sexuel, effet de mode ou trouble psychique ? Avis de sexologue.



« Jeune soumis sérieux cherche domina (trice) sérieuse sur Casablanca pour le dresser... », « Domina, ronde, charismatique cherche esclave sérieux prêt à devenir mien, à se soumettre à mes désirs et à me lécher les pieds... », « Jeune homme de Rabat cherche femme mûre prête à des expériences sexuelles toute habillée en cuir ou en latex... »... Ne soyez pas surpris et bienvenus dans le monde du fétichisme « Made in Morocco » ! Ce n’est qu’un petit échantillon de la multitude d’annonces postées quotidiennement sur les sites de rencontres par des amateurs en mal de rencontres « réelles ».

C’est quoi le fétichisme ?

Pour les néophytes, « le fétichisme est une excitation sexuelle provoquée par la présence d'un objet (Collants, escarpins, gants...), par une partie du corps ( Pieds, nombril, seins, fesses...), par une matière ( latex, cuir...) ou par une situation qui se produit en réponse à un objet ou une partie du corps atypiquement sexuel (sado-masochisme ...) », explique Dr Riad Nouisseri, sexologue à Rabat.

Causé par un contact visuel ou physique d'un objet, d'une partie du corps spécifique ou d'une situation, « le fétichisme est beaucoup plus courant chez les hommes que chez les femmes », précise le sexologue. Un constat qui s’affirme d’ailleurs après un simple tour sur les sites de rencontres et les applications spécialisées. Des hommes qui affichent ouvertement leurs préférences sexuelles. Ceci en prenant tout de même le soin de cacher leurs identités derrière des pseudos suggestifs. Mais aussi des femmes qui assument leurs fétiches, posent des conditions et réclament satisfaction.

Peur du rejet

« Ces personnes cachent souvent leurs tendances à leur entourage proche par peur de la stigmatisation et du rejet de la part de leurs partenaires. Ces derniers ne sont pas toujours «ouverts » à des expériences sexuelles aussi « atypiques » », nous explique Dr Nouisseri. Une peur qui peut selon le spécialiste causer une insatisfaction sexuelle voire une frustration chez le fétichiste mais peut aussi entrainer des ruptures par «incompatibilité ».

Cet engouement des Marocains pour le fétichisme est-il un signe d'ouverture d'esprit, de la simple curiosité ou un trouble psychique qui se déclare de cette manière? « « Dans ma pratique quotidienne en tant que sexologue, je ne reçois pas de patients se plaignant du fétichisme comme étant une source de souffrance. C'est plutôt un comportement sexuel avec des éléments et des préférences érotiquement « différentes » », nous explique le sexologue. D’après ce dernier, ces préférences « n’ont rien de maladif. Sauf dans les cas extrêmes ou une prise en charge psychique est indiquée », modère toutefois le sexologue.

Cas extrêmes ?

Mais avant d’en arriver aux cas extrêmes où l'on peut être victime de ses propres désirs, comment devient-on fétichiste ? « Il faut savoir qu’il n’y a pas une seule ou une cause commune pour devenir fétichiste. Cela dépend de la personne, de son enfance et de son évolution psychique et sexuelle. Ceci dit, les spécialistes conviennent toutefois que les différents types de fétichisme sexuel trouvent leurs origines dans l'enfance. Ceci bien avant la puberté et les premières expériences sexuelles d’un individu », analyse Dr Riad Nouisseri.

Les spécialistes indiquent également d’autres pistes expliquant ce type de tendances et préférences. Ils nomment les abus sexuels pendant l’enfance ou des traumatismes qui peuvent influencer la sexualité « négativement ». « C’est essentiellement dans ces cas de figure, qu’une thérapie professionnelle est indiquée pour éviter les dérapages liées à ces expériences traumatisantes », note le sexologue.

Si dans les cas « normaux », le fétichisme ne constitue pas en soi un trouble psychique, ses amateurs peuvent cependant « souffrir » du poids des préjugés et de l’opinion des autres. « C’est le principal des plaintes des quelques patients qui consultent pour fétichisme. C’est surtout comment se faire accepter et accepter ses « choix et préférences » par les autres et par les partenaires. Spécialement lorsqu’on est marié ou en relation de couple », conclut le spécialiste.