La chasse au trésor fait deux morts à Azilal
Mythe, sorcellerie et crime se croisent dans l'univers de la chasse aux trésors

La chasse aux trésors coute la vie à deux individus dans la province d’Azilal. Leurs corps ont été retrouvés enterrés sous les décombres d’une grotte effondrée. Loi, mythes et rituels entourant cette pratique…



Deux personnes s’ajoutent à la longue liste des victimes de la fièvre de la chasse aux trésors. Lundi, deux corps ont été retrouvés ensevelis sous les décombres d’une grotte effondrée dans la région de Tamguinante, province d’Azilal.

Les tentatives de sauvetage entreprises par les autorités locales et la gendarmerie royale, avisées par le compagnon des victimes, ont été en vain. Les deux corps ont été finalement retrouvés sans vie au fond de la grotte. Les parois fragiles de cette dernière se sont écroulées sous les coups de pioche acharnés d’un groupe de sept personnes. D’après les premiers éléments de l’enquête, ces individus étaient en effet en quête d’un supposé trésor enfoui au cœur de cette grotte.

Quête

Pratique répandue, les incidents liés à la chasse aux trésors au Maroc ne cessent d’alimenter les faits divers. Arrestations, escroquerie, enlèvement ou meurtre, les affaires liées à la recherche de trésors sont légion. Des histoires où se croisent mythe, sorcellerie et croyances superstitieuses à base d’offrandes et de rituels sacrificiels dont les principales cibles sont les « zouhris ».

Cette appellation désigne en effet les personnes à la ligne de main rare: La ligne de vie, la ligne de tête et la ligne de cœur se confondent en une seule séparant la paume en deux parties. Le zouhri peut également avoir une tâche à l’iris, des cheveux en tourbillon ou encore présenter une hétérochromie (yeux de couleurs différentes).

Rituels

Très rares, ces caractéristiques ont toujours fait des enfants zouhris, les cibles privilégiées de charlatans et de personnes en quête de richesse et de pouvoir. Selon la légende, les zouhris seraient la clé des butins enfouis. Ils auraient le pouvoir de détecter l’emplacement de trésors bien cachés et farouchement gardés par des esprits malins.

Utilisés par les chasseurs de trésors comme « carte » et « interlocuteurs » des Djins, ils sont souvent sacrifiés afin d’exhumer l’or et les pierres cachés. Des rituels dirigés par des fquihs spécialistes impliquant implorations et oraisons (Aâzima), versets protecteurs et égorgement d’enfant zouhri. En s'écoulant, le sang de « l’offrande » désigne la cachette du trésor.

Aujourd’hui encore, dans les zones rurales et montagneuses, les habitants parlent de trésors enfouis depuis des siècles et qui attendent à être déterrés. Auparavant, les grottes, les puits, les cimetières et les coins reculés servaient de « banque » aux familles aisées. Ces dernières y cachaient leur fortune loin de la portée des voleurs et des indiscrets. Après la mort de ceux connaissant le lieu secret de la cachette, le trésor devient selon la légende la propriété des esprits malins.

Loi

Des croyances nullement reconnues par la loi marocaine selon laquelle un trésor est la propriété de l’Etat. En effet, l’article 528 du Chapitre IX des crimes et délits contre les biens, stipule que « Quiconque, ayant trouvé un trésor, même sur sa propriété, s'abstient d'en aviser l'autorité publique dans la quinzaine de la découverte est puni d'une amende de 200 à 250 dirhams ».

Une simple amende qui peut se transformer en une peine de prison ferme si on se laisse tenter par l’éclat de l’or. « Tout inventeur qui, ayant ou non avisé l'autorité publique, s'approprie le trésor, en tout ou en partie, sans avoir été envoyé en possession par le magistrat compétent, est puni de l'emprisonnement d'un à six mois et d'une amende de 200 à 250 dirhams », précise l’article 528.