Cannes. Zineb Wakrim primée à la Cinef

Après avoir été primée au festival du cinéma d'Errachidia, la jeune cinéaste et lauréate de l'ESAV Zineb Wakrim remporte le 3e Prix de la compétition CINEF au festival de Cannes pour son court métrage poétique « AYYUR ».

Le Jury Courts Métrages et La Cinef exécutés par Ildikó Enyedi et composé d'Ana Lily Amirpour, Shlomi Elkabetz, Charlotte Le Bon et Karidja Touré a demandé hier les Prix La Cinef 2023 lors d'une cérémonie qui s'est tenue au Théâtre Buñuel, suivi de la projection des films gagnants.

Âgée de 22 ans, la jeune marocaine Zineb Wakrim a subjugué le jury avec son court métrage « Ayyur » qui lui a valu la 3ème place après la danoise Marlene Emilie Lyngstad « Norvegien Descendants » et la sud-coréen Hwang Hyein « Trou ».

Ravie d'avoir remporté ce prix, Zineb Wakrim qui ne croyait pas trop à cette récompense lorsqu'elle a décidé de participer à ce concours s'est dit « reconnaissante… c'est un premier pas », peut-on lire sur sa page Facebook. « Grâce à elles... je fais du cinéma aujourd'hui ! Je ne peux célébrer ce grand événement sans penser à ces grandes dames, militantes et fondatrices de Tamayouz (Simone Bitton, Lamia Chraibi, Narjiss Nejjar, Farida Belyazid, Dounia Benjelloun).

« Filmer la laideur, ce serait l'atténuer »

Inspiré du film iranien « La maison noire » de la poétesse contemporaine Forough Farrokhzad sur les lépreux des années 60, le court-métrage « Ayyur », qui signifie « lune » en langue amazighe, fait le portrait contemplatif de deux enfants de la lune. Cette maladie héréditaire rare les rend hypersensibles aux rayons ultraviolets et leur interdit toute exposition au soleil. Les deux adolescents de 14 ans, lorsqu'ils ne sont pas couverts de la tête aux pieds et enfermés dans un scaphandre pour pouvoir sortir à la lumière du jour, trouvent refuge dans l'art et la peinture.

En 13 minutes, la caméra de Wakrim pose un regard pudique sur le quotidien ritualisé de Samad et Hasna. Leurs visages mouchetés de tâches brunes semblent interroger le monde mais leur silence fait fatalement écho à l'enfermement de leur condition. Plutôt que de leur donner la parole, la réalisatrice a choisi en voix des poèmes persans de Fourough Farrokhzad traduits en amazighe. Entre lumière et obscurité, espoir et résignation, Zineb Wakrim représente des enfants ruraux marginalisés avec tendresse et humanité.

« Ayyur tente de traiter au mauvais regard, à la mauvaise estime que nous portons envers des personnes différentes en les ciblant de monstre. Inspiré du film de Forough Farrokhzad, « Ayyur m'a permis d'agir aussi sur le réel…Filmer, rendre visible la laideur ce serait l'atténuer. Ne pas détourner le regard c'est rendre beau, la laideur n'existe pas quand vous voyez un homme posé en tant qu'un homme, vous découvrez la beauté», confie la réalisatrice.