Al Khabar et L’Expression ont révélé lundi dernier un dangereux complot qui vise la stabilité de l’Algérie. Comme les Algériens entendent déjà depuis l’indépendance que leur pays est menacé par des "ennemis classiques" et des "ennemis traditionnels", les responsables des services se sont dit que tout le monde va y croire. Allons-y donc, lâchons la bombe. Et la bombe a été lâchée.

Le scoop. Les services de renseignement de trois pays se sont réunis lundi dernier à Tel Aviv avec un seul point à l’ordre du jour, la création de troubles dans des villes algériennes pour déstabiliser le pays. Et qui sont ces services de renseignements? Déjà comme c’est à Tel Aviv, on sait que le Mossad est de la fête. Et puis pour les autres, les journalistes algériens, vous diront qu’il s’agit des renseignements marocains et français. 

Récapitulons donc: Le Maroc, la France et Israël en veulent à l’Algérie est ont décidé de comploter contre elle. 

Première remarque. L’information n’a pas été donnée par la fameuse Agence algérienne de presse (APS) qui est le porte-parole attitré du renseignement militaire. Ceci veut dire que les officiels ne voulaient pas être mêlés à cette histoire fumeuse. Après ils diront qu’ils n’y sont pour rien. Certes, mais est-ce suffisant? Si le Maroc et Israël sont habitués à l’intox algérienne qu’en est-il pour la France? Un pays ami, frère, cousin, voisin, camarade….En plus, le président Abdelmajid Tebboun se prépare à le visiter en ce mois de juin. Donc, l’information a été  balancée de sorte qu’on ne dise pas que ce sont les services officiels qui l’ont fait. Innocents donc.

Ensuite, il faut bien réfléchir un peu. Comment le James Bond d’Alger a pu pénétrer un secret qui doit être, on le comprend, extrêmement bien gardé? Il ne peut y arriver qu’en infiltrant l’un de ces services. Le Maroc? La France? Israël? Et bien entendu l’infiltration doit se faire au plus haut niveau parce que ce genre d’activités ne peut être connu que par les grands patrons. Bon déjà on se dit que le concombre est trop grand. 

Quoi qu’il en soit, ni les Israéliens, ni les Français ni encore moins les Marocains n’ont eu à se déranger pour répondre à cette accusation très grave. Ils ont l’habitude avec la junte militaire qui a déjà servi pas mal de mensonges et qui en servira tant qu’elle dirige le pays. Ce sont les Algériens qui ont répondu, qualifiant cette information de ridicule, dangereuse et perverse.

Perverse parce que, comme l’explique un opposant algérien, le pouvoir qui craint un soulèvement populaire prépare déjà sa réthorique pour dire aux Algériens que c’est ça le complot maroco-israélo-français. Ce qui évidemment va justifier le tabassage et l’intervention militaire avec des balles réelles pour stopper les manifestants. 

Dangereuse parce que ces révélations trahissent un grave conflit au sein du pouvoir algérien. Il y a le clan du président d’un côté et celui du chef d’Etat-major de l’armée de l’autre. Et ce dernier qui a trop toléré le premier ne voudrait pas qu’il se représente aux prochaines présidentielles. 

Enfin, deux jours après, la poussière est retombée et les Algériens ont compris que cette intox n’était pas dirigée contre les pays cités mais contre eux-mêmes pour leur prouver que l’ennemi extérieur existe bel et bien. Et bien sûr il faut bien choisir les meilleurs services de renseignement pour montrer à quel point ce « pays-continent » est grand, stable, prospère… Et que la baraka des martyrs est toujours active.