HIYA appelle à un sit-in pour réclamer la réforme de la Moudawana
La réforme de la Moudawana revient comme un leitmotiv chez les féministes

Les féministes passent à la vitesse supérieure et investissent la rue pour réclamer la réforme intégrale et en urgence de la Moudawana. Leur nouveau porte-parole se nomme HIYA et organise un rassemblement populaire ce dimanche à Casablanca.

   HIYA, c’est l’appellation choisie pour le mouvement fraichement lancé par une brochette d’activistes féministes des plus véhémentes. A peine créé, HIYA se joint aux différentes voix appelant à la réforme du Code de la famille et du code pénal en organisant un grand rassemblement populaire pour les droits des femmes. Le rendez-vous est donné  ce dimanche 25 juin sur la Place des Nations Unies à Casablanca. 

Revendications 

 « Un sit-in historique » comme le décrit un communiqué de HIYA qui en appelle à la mobilisation de tous pour faire entendre sa voix. Ainsi associations, féministes, collectifs, citoyens… Tous sont invités à venir réclamer « égalité et justice » en défendant la cause féminine.

Les revendications de HIYA ? « Une refonte totale de la Moudawana qui n’a pas été révisée depuis 19 ans. Son adaptation avec la société marocaine actuelle et son alignement avec les préceptes de la Constitution 2011», nous explique Yousra El Barrad, activiste féministe et membre du mouvement. 

En détail ? « Nous revendiquons un code de la famille qui interdit et pénalise le mariage des enfants, qui privilégie l’intérêt supérieur de l’enfant comme clé de voûte de la légifération et la prise de décisions judiciaires », réclame les activistes de HIYA.

Si les enfants sont au cœur des doléances de HIYA, la femme et ses droits n’en sont pas moins défendus. « Il est temps de la mise au point d’un code de famille égalitaire qui valorise le travail des femmes au sein du foyer, qui garantit l’autorité parentale conjointe  que ça soit en termes de tutelle, de garde et de responsabilités conjointes », nous explique El Barrad.

A HIYA, on revendique également l'équité dans le droit successoral, la reconnaissance du mariage d’une femme marocaine avec un non-musulman et l’interdiction de la polygamie et l’annulation des formes désuètes de divorce.

Ras le bol

Des doléances qui sont portées par les associations féministes depuis des années et qui peinent toutefois à aboutir. « Et ce n’est pas faute d’essayer. Les activistes n’ont de cesse de le réclamer, la moudawana est aujourd’hui dépassée et carrément non- constitutionnelle. Elle n’est nullement accordée avec la philosophie de la Constitution 2011 et n’arrive plus à suivre l’évolution et les mutations de notre société. Or, la refonte tarde toujours à arriver », regrette Yousra El Barrad qui milite depuis des années  dans les rangs de la Fédération des ligues des droits des femmes (FLDF).

Un ras le bol partagé par les initiatrices du mouvement HIYA qui se disent « Déçues par les politiciens ». « Nous utilisons la rue comme lieu d'expression. Nous nous donnons la mission de plaider, mobiliser et militer pour un environnement juridique, économique et social égalitaire », proclament-t-elles en faisant recours à cette ultime solution. 

Pourquoi ça bloque ?

Mais qu’est ce qui bloque le changement malgré ce besoin pressant et cette volonté « collective » ? « Sincèrement comme activistes de la société civile, nous nous demandons également pourquoi ça bloque malgré les différentes promesses de révision émises au fil de 19 ans. Ceci dit, je pense que les normes rigides de genre sont d’une grande résistance », note Al Barrad.

D’après cette dernière, nous sommes pris dans un cercle vicieux où le normatif se joint aux traditions, à l’Histoire, à l’héritage culturel, ainsi qu’aux lois pour produire une mentalité profondément patriarcale. « Cette dernière engendre des codes légaux et sociaux suivant le même schéma tout en le perpétrant », analyse l’activiste HIYA.       

 Halte à la violence      

Au-delà de la lutte contre la « discrimination » légale et sociale anti-féminine, les activistes de HIYA réclament la création d’un dispositif de protection efficace contre les féminicides et les violences faites aux femmes. « Y compris la légalisation de le l’avortement »,reviennent-elles à la charge en évoquant l’une des problématiques les plus épineuses qui tient au cœur des féministes marocaines.

« Nous revendiquons également une réforme humaniste du Code pénal afin de l’aligner avec les dispositions de la Constitution de 2011 et des traités internationaux signés par le Maroc », ajoute l’activiste.  Décryptage ? HIYA, à l’instar du collectif «MN7’9NA » (C’est notre droit), lancé il y a quelques jours et luttant pour les droits humains, réclame l’abrogation des dispositions légales pénalisant l’exercice des libertés individuelles. Dans leur ligne de mire ? L’article 453 du code pénal  interdisant l’avortement, l’article 490 incriminant les relations sexuelles hors mariage et l'article 489 qui criminalise  «les actes licencieux ou contre nature avec un individu du même sexe».

Pour rappel, HIYA est un mouvement inter-associatif qui se définit comme a-partisan, « ouvert à toutes et tous, dans une démarche intergénérationnelle, inclusive et horizontale ». Il a été co-fondé par sept militant(e)s féministes : Ghizlane Mamouni et Karima Nadir de Kif Mama Kif Baba, Sarah Benmoussa, créatrice de 7achak.Maroc, Houda Charhi, créatrice de Bent Darhoum, Camélia Echchihab, créatrice de Feminicides.Maroc, Dina El Moukhtari et Abdelmajid Moudni de Médias & Cultures.