Patrimoine détruit par le séisme : l’urgence d’un « plan stratégique d’envergure nationale »

En plus des pertes humaines, le violent séisme de magnitude 7 qui a dévasté une grande partie du pays dans la nuit de vendredi à samedi a sérieusement fragilisé le patrimoine culturel et architectural de toute la région d’El Haouz. Pour Monceyf Fadili, expert international en planification urbaine et développement territorial : « un plan stratégique d’envergure nationale en trois étapes est nécessaire » pour redresser la situation.

Provoquant des dégâts matériels considérables, le séisme d’Al Haouz a détruit plusieurs sites historiques dans les zones montagneuses enclavées proches de l'épicentre mais aussi dans les villages du Haut-Atlas (Imlil, Moulay Brahim, Ouirgane, Tinmel et sa mosquée historique du 12ème siècle complètement démolie...).

Marrakech a aussi vu certains de ses joyaux architecturaux endommagés. Dans la médina, de nombreux bâtiments se sont effondrés après la secousse, laissant des tonnes de gravats dans les rues étroites.

Sur la place Jemaa el-Fna, le minaret de la mosquée Kharbouch s’est lui partiellement effondré.

Bien qu’ayant résisté au tremblement de terre, la mosquée Koutoubia, joyau du patrimoine islamique, a elle été endommagée et les secousses ont provoqué des fissures dans sa structure séculaire.

Surveiller l’activité sismique de la chaine de l’Atlas

Acquiesçant les dires d’un scientifique, selon lesquels « cette magnitude va changer la manière dont les scientifiques vont regarder l’activité tectonique au front nord de la chaîne de l’Atlas et cela va changer aussi la manière qu’a la société marocaine d’appréhender l’activité sismique et ses conséquences sur le bâti, sur les constructions », Monceyf Fadili rappelle que « c'est l'habitat rural, essentiellement fait de pisé, mais aussi les différentes formes d'habitat informel et non-réglementaire, qui sont les plus vulnérables aux séismes et à leurs conséquences dévastatrices ».

Réduire la faille entre l’urbain et le rural

Encore une fois, dit-il, « ce sont les populations pauvres qui se trouvent en première ligne face aux catastrophes naturelles avec, en toile de fond, le retard criant qui caractérise le monde rural, hors des circuits du développement en termes de desserte et d'infrastructures, d'équipements de base et d'accompagnement. Un lourd tribut que payent aujourd'hui les habitants des provinces du Haouz et de Chichaoua, qui figurent parmi les plus pauvres du Maroc ».

Marrakech où de nombreuses maisons menacent ruine dans la médina et dans les quartiers d'habitat informel, la ville de Taroudant est aussi affectée.

Le bilan officiel à ce jour est 2.497 morts et 2.476 blessés ainsi que des milliers de familles dans la rue.

« Plan stratégique d’envergure nationale »

Vantant le mérite du génie militaire marocain et leur expérience dans la gestion de ce genre de catastrophe naturelle, l’expert international parle de la nécessité d’établir un « plan stratégique d’envergure nationale » : phase de recensement des dégâts, relogement des populations touchées par le séisme dans des tentes avant l'hiver et phase de reconstruction.

Au-delà des initiatives de solidarité et la création du Fonds spécial pour la gestion des effets du tremblement de terre, « l'urgence de dispositions et de mesures en matière de normes de construction et d'encadrement du bâti s'impose, en milieu rural et urbain, en phase avec la gestion des zones à risques et la sécurité des citoyens », conclut-il.

L'Unesco aidera pour la reconstruction

Pour sa part, l’Unesco a annoncé qu’il aidera le Maroc à inventorier les dommages causés à son patrimoine et à préparer sa reconstruction, selon sa directrice générale. « Une mission de l’Unesco s’est rendue dans la médina de Marrakech. Notre organisation soutiendra les autorités marocaines pour inventorier les dégâts dans les domaines du patrimoine et de l’éducation, mettre les bâtiments en sécurité et préparer la reconstruction », a affirmé Audrey Azoulay samedi sur le réseau social X (ex-Twitter).