Asmae El Moudir, la réalisatrice marocaine qui séduit l’étranger
La réalisatrice, scénariste et productrice marocaine Asmae El Moudir.

Âgée de 34 ans, Asmae El Moudir est la première réalisatrice, scénariste et productrice marocaine à avoir remporté l’Etoile d’or au dernier Festival International du Film de Marrakech pour son 1er long métrage « La Mère de tous les mensonges ». Mi-fiction mi-documentaire sur les années de plomb au Maroc, le chef-d’œuvre primé dans plusieurs festivals prestigieux révèle le talent inégalé et l’approche artistique novatrice de la jeune cinéaste qui devient ainsi la nouvelle figure du 7e art national qui contribue à faire rayonner un nouveau genre de cinéma marocain à l’international.

Après avoir été primée au dernier festival de Marrakech, Asmae El Moudir, lauréate des "Ateliers de l’Atlas", le programme industrie de développement de talents initié en 2018 par le FIFM, est devenue une source d’inspiration et un modèle de persévérance pour tous les Marocaines et les Marocains. Un rêve qui se concrétise pour celle qui a travaillé très dur avant d’atteindre le sommet et de rivaliser avec les plus grands.

Asmae El Moudir, première réalisatrice marocaine à avoir remporté l'étoile d'or au Festival de Marrakech.

Née à Salé en 1990, la réalisatrice, scénariste et productrice marocaine voue un amour inconditionnel au cinéma depuis sa plus tendre enfance. A 10 ans, elle s’éprend de la magie du grand écran après avoir découvert le film « Ali Zaoua » de Nabil Ayouch.

Titulaire d’un master en cinéma documentaire de l’Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan et d’un master en production audiovisuelle de l’Institut supérieur de l’information et de la communication (ISIC) de Rabat, elle a également étudié à La Fémis à Paris. Passionnée particulièrement par la photographie, elle excelle dans l’art de raconter des histoires. « J’ai trouvé dans le cinéma le moyen idéal pour exprimer mes idées », confie-celle qui porte en elle «les espoirs et les rêves de tous ceux qui viennent, comme elle, de milieux modestes et qui aspirent à changer le monde à travers leur art».

Asmae El Moudir avec Jessica Chastain à la 20ème édition du FIFM.

Une mosaïque de genres

En 2010, Asmae El Moudir se distingue avec son court métrage « La dernière balle » qui a participé à la compétition de la 12ème édition du festival du film de Tanger. Depuis, sa filmographie incarne une mosaïque de genres et de thèmes : fictions, documentaires, vidéoclips…, ses œuvres : «Les Couleurs du silence», «Mer(e)», «Thank God It’s Friday» ou «The Postcard-2020» (sélectionné au Festival international du film documentaire d'Amsterdam (IDFA) et au FIFM) ; présentent une exploration minutieuse des émotions humaines et de la complexité narrative. Son engagement envers le cinéma transparaît aussi dans ses collaborations avec plusieurs chaînes de télévision telles que la SNRT au Maroc, et, ailleurs, Al Jazeera Documentary, la BBC et Al Araby TV. En 2022, son intégration au Netflix Equity Fund aux côtés de quatre autres cinéastes arabes a marqué un tournant, soulignant son influence en tant que pionnière marocaine dans l’industrie.

Une œuvre inclassable

Lorsqu’elle décide de se pencher sur les émeutes de la faim de juin 1981 ; un chapitre sombre et méconnu de l’histoire marocaine ; elle accouche d’un chef d’œuvre intimiste et inclassable qui sort du lot.

Dans La Mère de tous les mensonges, Asmae El Moudir a utilisé des maquettes et des figurines pour raconter une période sombre de l'histoire du Maroc.

Tourné en format hybride, mi-fiction mi-documentaire, "La mère de tous les mensonges" est un ovni dans le cinéma marocain. Projeté dans plus de 35 pays, le film que la réalisatrice a mis dix ans à mettre au point, séduit à l’international. Et puisqu'il s'agit de reconstituer des événements passés où l'archive visuelle n"existe pas, la cinéaste décide de mettre en scène des miniatures, représentant sa famille et son quartier, une idée ingénieuse qui révèle le génie de la jeune cinéaste.

D’une durée de 96 minutes, le documentaire en langue arabe est devenu le premier film marocain à remporter l’Etoile d’Or dans l’histoire du Festival international du film de Marrakech, organisé sous le Haut Patronage de SM le Roi Mohammed VI. Réalisé en 2023, il avait remporté aussi le prix de la mise en scène dans la section "Un Certain Regard" du Festival de Cannes ainsi que le prix du meilleur film de sa catégorie, lors de la 44e édition du Festival international de Durban (Australie), tenue du 20 au 30 juillet 2023 en Afrique du Sud. Et cerise sur le gâteau, il a été sélectionné pour représenter le Maroc aux Oscars 2024, dans la section « Meilleur film international ». Une consécration pour Asmae El Moudir qui joue désormais dans la cour des grands et qui travaille sur son prochain documentaire à la résidence de Cannes.