Tanjazz 2024 : Keziah Jones enflamme la scène du palais des institutions
Keziah Jones-Tanjazz 2024.

Après près de dix ans d’absence discographique depuis Captain Rugged (2013) compensées par de sporadiques apparitions live, Keziah Jones revient avec un nouvel album Live qu’il présente lors de sa nouvelle tournée. Samedi soir, la star nigériane du blufunk a bluffé le public tangérois avec son électrique jeu de guitare et sa fusion explosive avec le Gnaoui casablancais Saad Tiouly.

Après plusieurs années d’absence, le guitariste virtuose et interprète du célèbre morceau « Rythm is love » n’a pas pris une ride. Fidèle à son blufunk inimitable, un style singulier qu’il a créé lui-même, mêlant avec brio blues et funk, la bête de scène a enflammé samedi soir la scène BMCI au Palais des institutions de Tanger et a subjugué le public avec ses riffs puissants, sa voix envoûtante, son incroyable jeu de guitare, la dextérité de ses doigts magiques et ses solos impressionnants.
Le guitariste et chanteur nigérian Keziah Jones- Tanjazz 2024.
Accompagné par un batteur déchaîné et un bassiste transcendé, Keziah Jones a livré des reprises magistrales et ses titres les plus célèbres lors d’un concert où blues, soul et funk étaient imprégnés de rythmes africains.Moment fort de la soirée, l’artiste charismatique a invité sur scène, le talentueux gnaoui casablancais Saad Tiouly, créant, le temps d’un set, un tempo enivrant mêlant les sonorités du blues aux rythmes ancestraux de la tagnaouite.Avant de monter sur scène, l’artiste aux textes engagés venu célébrer "l’unité africaine” nous a confié être ravi de retrouver le public marocain qu’il trouve « chaleureux et réactif ».
Keziah Jones et Saad Tiouly- Tanjazz 2024.
Vous revenez après dix ans d’absence. Où êtes-vous passés tout ce temps ?Dans différents endroits (rires), principalement au Nigeria où je vis. Je travaillais dans mon studio, je faisais des tournées en Europe, et j’ai fait plusieurs projets avec différents artistes (films, danses ... ). Effectivement, ça fait longtemps mais je suis toujours là.Vous avez déjà joué au Maroc il y a quelques années à Jazzablanca mais c’est votre première fois à Tanjazz. Cela vous fait quoi de retrouver le public marocain ?Je n’ai pas trop visité la ville de Tanger mais on m’en a beaucoup parlé, et je me sens bien de retourner, je sens que le concert va bien se passer, la dernière fois que je me suis produit au Maroc, ça s’est très bien passé, du coup, j’ai un bon feeling, le public est toujours réactif, ce soir, on va faire une fusion avec le Gnaoui Saad Tiouly.J’ai sorti un album Live de ma musique mixé par Russell Elevado (Alicia Keys, D’Angelo). C’est un enregistrement live incluant deux nouveaux titres et deux nouvelles reprises en bonus track, deux singles vont bientôt sortir dont « Melissa » le 25 septembre prochain.
Keziah Jones.
Qu’est-ce qui vous a inspiré pour le morceau « Melissa » ?C’est un album qui s’apparente un peu ce que j’avais fait il y a longtemps, ce sont des chansons Mélo, paisibles, ça faisait longtemps que je n’avais rien sorti, et j’espère que les gens vont aimer.« Melissa » est une chanson qui décrit l’état d’esprit et le ressenti d’un jeune qui tombe amoureux pour la première fois. C’est comme une sorte d’initiation en amour, ce premier désir pour quelqu’un, ce truc qui vous tient aux tripes, lorsque vous avez des papillons dans le ventre...je voulais faire une chanson qui décrit un peu ce sentiment.Vous allez collaborer ce soir avec le jeune Gnaoui Saad Tiouly. Comment selon vous une fusion peut être réussie ?Du moment que vous savez écouter, et que vous êtes ouvert, tout est possible. En plus Saad Tiouly est un excellent musicien, et un très bon joueur de gembri, et je pense que c’est facile pour nous de faire les arrangements. Sa musique peut facilement fusionner avec celle qu’on joue, des rythmiques funk, ...je pense que lorsque les artistes s’écoutent mutuellement, ça fonctionne à merveille.Qu’en est-il de l’improvisation ?Oui, il y a beaucoup d’improvisation quand on fait une fusion. Des fois, ça peut être difficile avec le son du Gembri mais on a fait les répétitions et ça a bien fonctionné.Jimmy Hendrix vous a énormément influencé. En quoi sa musique vous a marqué ?Jimmy est un artiste très original, c’est quelqu’un qui prenait la musique pour quelque chose de sérieux, ceci étant, j’ai été inspiré par beaucoup de musiciens comme Miles Davis ou Fela Kuti, ... En fait, c’est surtout sa façon de jouer de la guitare, parce qu’avec la guitare, il n’y a pas vraiment un truc nouveau que tu peux faire avec, mais il y a toujours ta touche personnelle qui fait la différence, donc, moi, j’ai essayé de faire quelque chose de nouveau, à ma manière.Jimmy a été un personnage très inspirant pour moi, l’idée qu’il a de la musique comme étant un outil profond et essentiel au service de l’Humanité, me parle énormément et j’ai toujours cautionné cette philosophie.Vous accordez beaucoup d’importance aux mots que vous choisissez méticuleusement. Vous considérez-vous comme un artiste engagé ?Je pense que la Musique est très importante, les sons sont importants, ils vous aident à comprendre les choses qui nous entourent plus facilement. Le monde dans lequel on vit est compliqué et la musique peut aider à nous sentir mieux, et à mieux digérer la pilule philosophiquement parlant.Pensez-vous vraiment que la musique a le pouvoir de changer les choses ?Je pense que oui et d’ailleurs, elle a l’obligation même de le faire. Dans les années 60 et 70, la musique et l’Art ont changé énormément de choses dans la société. Même chose d’ailleurs avec l’avènement de la musique électronique dans les années 80 et 90 en Grande Bretagne. Au Nigéria, on a en ce moment l’Afrobeat, ça change énormément la façon de faire et de voir les choses, ça a changé les attitudes.Je pense que la musique et la société vont de pair, ils s’influencent mutuellement. Et quoi qu’on fasse musicalement, cela impacte forcément la société d’une manière ou d’une autre.