Youcef Drissi Anticonformiste, rebelle et décalé !

Lauréat de Casa-Moda Academy et Meilleur jeune créateur de mode en Afrique en 2018, le jeune styliste meknassi, âgé de 22 ans, au look anarchiste séduit par ses modèles fantaisistes et ses coupes audacieuses. Son style anticonformiste inspiré des années 90, vacille entre formel et informel, avec une touche à la fois décalée et contemporaine.

 

Lors de la 11e édition du FIMA 2018 (Festival International de la Mode en Afrique) à Dakhla, vous avez remporté le 1er prix jeunes créateurs, grâce notamment à votre collection au style un peu décalé. Qu’est ce qui vous a inspiré ?

 

C’est typiquement inspiré des années 90. Il s’agit d’une sorte de confrontation, d’une rencontre improbable ou plutôt d’un paradoxe entre deux environnements : un milieu carré et formel, où l’on respecte les codes vestimentaires, celui du bureau et de l’entreprise et puis, un côté complètement juxtaposé qui est la rue et la cool jeunesse des années 90. C’est donc la juxtaposition entre le côté carré et formel et le côté complètement libre dépourvu des carcans sociaux. C’est en fait la collection de fin d’études qui résume bien mon propre univers.

 

Qu’est ce qui vous a donné envie de faire ce métier ?

 

La mode est un outil d’expression qui combine plusieurs domaines qui me parlent. J’ai déjà suivi des études d’Arts Appliqués au Lycée, donc, le monde de la mode ne m’était pas étranger parce que je touchais déjà au Design et aux produits de communication.

 

Vous avez toujours su que c’est ce que vous vouliez faire de votre vie ?

 

Je crois que j’ai toujours eu cette fibre artistique qui anime chaque artiste. Depuis tout petit, j’aimais peindre avec mon père qui m’a en quelque sorte initié au dessin. Je voulais être un artiste mais je ne savais pas si j’allais m’orienter vers la peinture, la sculpture, l’architecture d’intérieur ou vers une autre discipline mais à partir de 10 ans, je commençais à habiller les poupées avec mes propres créations, et c’est venu tout naturellement par la suite.

 

 

Quels sont les tissus que vous affectionnez particulièrement ?

 

Côté technique, j’aime beaucoup déconstruire et reconstruire un tissu et souvent, ma base est le propre tissu d’un vêtement quelconque. Par exemple, si je veux travailler une veste tailleur déstructurée, je vais me baser sur le vrai tissu tailleur ; de même pour une chemise, je choisirais du popeline classique, du tartan, du drap au mètre, de la gabardine, …ce sont des tissus différents plus ou moins classiques.

 

Qu’est ce qui vous plait dans les années 90 ?

 

Pour moi, les années 90 portent en elles l’ADN anticonformiste par excellence, ce côté déconstruction, reconstruction, un peu décalé. J’aime faire des choses audacieuses, sortir du lot, aller plus loin et repousser les limites, créer quelque de nouveau, propre à moi, sinon, quel est l’intérêt de la Mode ? J’aime beaucoup l’expérimentation et faire de nouveaux essais. Je me base énormément sur l’aléatoire et l’expérimentation, je travaille souvent avec d’anciennes pièces que je trouve dans des fripes, et que je retravaille par la suite à ma guise, que je découpe et recolle différemment.

 

Quels sont les designers dont vous admirez le travail ?

 

L’américain Virgile abloh, ou encore Demna Gvasalia qui est le directeur artistique de Balenciaga. Ce sont des jeunes créateurs qui ont rendu la mode plus street et jeune. J’aime aussi le travail du belge Raf Simons, ou encore celui des japonais Rei Kawakubo et  Yohji Yamamoto, de véritables précurseurs de l’antifashion des années 90.

 

Qu’est ce qui vous attire dans la Mode de la rue ?

 

C’est surtout ce côté Free style qui m’intéresse. J’aime beaucoup m’inspirer des phénomènes de la société, je m’intéresse à comment les gens s’habillent dans leur vie quotidienne, je suis quelqu’un de très visuel et je me mets souvent à la place du citoyen lambda qui doit chaque matin résoudre le casse tête de quoi mettre et comment agencer ses habits ?

 

Votre look, c’est réfléchi ?

 

C’est plutôt spontané !

 

Quelle image souhaitez-vous passer de vous ?

 

L’image de moi-même, un jeune marocain assez rebel, joyeux et cool.

 

Qu’est ce qui vous révolte ?

 

C’est d’être limité et assez carré par rapport à plusieurs choses. Ça m’énerve cette manie qu’ont les gens de suivre par habitude les règles de la société, j’aime bien remettre les choses en question mais de manière ludique.

 

Qu’aimez-vous à part la Mode ?

 

J’adore l’art contemporain et surtout les installations artistiques, ça m’inspire énormément.  J’aime aussi la sous culture et la culture underground.

 

Avez-vous conscience qu’avec le prix que vous avez emporté, plusieurs opportunités vont s’offrir à vous ?

 

Oui et non, en tout cas, c’est quelque chose dont je suis particulièrement fier. C’est la 1ère fois que ce défilé est organisé au Maroc et je suis le 2e gagnant marocain du FIMA après Hamza Guelmouss au Niger et je suis content de participer à la prochaine édition du festival pour présenter ma 2e collection.

 

Quelles sont vos ambitions ?

 

J’ai envie d’apprendre tout ce a trait à la Mode, que ce soit sur le plan technique ou Marketing, …pour que je puisse développer ma propre marque made in Morocco adressée à une clientèle internationale âgée de 20 à 35 ans. Je suis très conscient qu’il faut prendre en considération le côté commerce et vente ; il y aura donc des pièces un peu folles, super chargées, et d’un autre côté, il y aura des tenues portables mais toujours dans le même esprit de mes créations.

 

Des projets ?

 

Je développe une collaboration avec un concept store à Paris qui aide les jeunes créateurs à financer leurs produits en termes de tissus et production. J’ai proposé une pièce robe tailleur- disco année 90 en phase avec la thématique de cette année.

 

Si vous devez vous définir en quelques mots ?

 

Joie de vivre.