« La réforme ne se donne pas les moyens de ses ambitions»
Mohamed Shaimed, Secru00e9taire gu00e9nu00e9ral de la Fu00e9du00e9ration autonome denl'enseignement affiliu00e9e u00e0 l'Union Gu00e9nu00e9rale des Travailleurs du Maroc (U.G.T.M)

L’Observateur du Maroc. Quelle est votre évaluation de la situation actuelle de l’enseignement dans notre pays ?

Mohamed Shaimed. Le système éducatif actuel souffre d’une crise structurelle, fruit de visions ayant limité les responsabilités de ce secteur à quelques acteurs. Or, la réforme de l’enseignement est une affaire nationale qui devrait impliquer roi, peuple et gouvernement. D’ailleurs, l’échec des Premières et deuxièmes Assises d’frane et des assises nationales de 1995 pour la réforme de l’enseignement ont démontré l’absence d’une vision globale et consensuelle unifiant tous les acteurs qu’ils soient politiques, sociaux, économiques et syndicaux. Il faut rappeler d’ailleurs que cet échec cuisant en 1995 a été imputé à la grande discorde à propos du financement et de la langue. La note positive de cette première tentative d’élaboration de réforme reste la création par feu Hassan II de la Commission spéciale Education- Formation présidée par son conseiller Abdelaziz Meziane-Belfkih. Une initiative qui a le mérite d’être fédératrice et représentative des différentes composantes et d’avoir abouti à la Charte nationale de l’éducation et la formation. Cette charte prometteuse a été toutefois castrée car privée des moyens et des mécanismes pratiques pour la réalisation de ses objectifs ambitieux. Car il est inconcevable d’imaginer une véritable réforme sans lui consacrer un budget spécial et exceptionnel. Si les moyens manquaient auparavant, le gouvernement précédent, lui, avait la possibilité de financer la réforme avec les 45 milliards du plan d’urgence… mais les responsables ont préféré voir ailleurs. Autre bémol qui n’a pas manqué de « dilapider » les efforts déployés pendant plus de dix ans : l’absence d’évaluation des reformes entreprises. Au niveau des syndicats, nous n’avons jamais cessé de réclamer l’évaluation d’une décade de changement pour pouvoir en tirer les bonnes leçons, sans retour. La publication du premier rapport du Conseil supérieur de l’enseignement en 2008 a été un événement phare vu qu’il a précédé à une véritable autopsie de la situation. Il aurait pu engendrer « une réforme de la réforme » en rectifiant le tir. Mais on a préféré faire la sourde oreille…

D’après vous, où les différentes tentatives de réforme ont-elles échoué ?

Il faut rendre à César ce qui est à César. Je suis contre l’utilisation du mot échec ça sera nier les importants efforts qui ont été déployés de part et d’autre pour la mise à niveau du secteur tout au long de ces dernières années. Si les plans de réformes ont raté quelques uns de leurs objectifs, ça n’empêche qu’ils ont fait des réalisations plutôt positives. Il faut dire que la réforme de l’enseignement a été victime quelque part de ses grandes ambitions pour lesquelles elle ne s’est pas donné les bons moyens. Prenons l’exemple de l’obstination à améliorer le taux de scolarisation qui a donné lieu à des classes surchargées car manquant d’infrastructures adéquates. Une course vers le quantitatif qui a donné un sacré coup au qualitatif. Une politique qui a endommagé gravement la qualité de l’enseignement de notre pays et l’a laissé à la traine ces dernières années. Autre ratage et de taille, les différents plans de réformes ont oublié de remédier à la carence en ressources humaines qualifiée que ça soit dans le corps des enseignants ou dans l’administration. Dans l’élaboration du budget de la réforme, il fallait consacrer la part belle à la formation ce qui aurait pu jouer un double rôle dans l’alimentation du secteur par de nouveaux enseignants qualifiés et d’absorber les taux de chômage de plus en plus alarmants. Ceci sans parler de l’adaptation et l’amélioration des programmes scolaires qui doivent s’ouvrir sur la société marocaine et sur le monde et accompagner leur évolution.

Quelles sont vos propositions concrètes pour une réforme réussie ?

Au sein des syndicats, nous sommes partie prenante de la grande question de la réforme de l’enseignement qui devrait être l’objet d’un débat national intégral. Ce débat là n’est possible qu’à travers la réactivation du Conseil supérieur de l’enseignement dont l’activité a été gelée depuis le décès de son président délégué Meziane Belfkih. Ce même conseil était en train d’élaborer son deuxième rapport sur la situation de l’enseignement lorsque les choses se sont arrêtées avec la disparition de Belfkih. Avec l’avènement du nouveau gouvernement, le ministre El Ouafa en a rajouté en faisant de la réforme de l’enseignement son terrain privé en excluant le conseil qui réunit les différents acteurs. Nous pensons que l’heure est à la révision de la version actuelle du conseil et de son rôle qui ne doit plus se limiter au simple conseil. Il faut également revoir son statut légal et sa loi organique pour mieux l’adapter à la nouvelle Constitution. Pour nous, le conseil supérieur reste le meilleur moyen de fédérer les visions et les efforts pour une réforme harmonieuse mais surtout fructueuse. деревянный дом сруб продажа