Analyse - Radioscopie des résultats 2018 de la place casablancaise

Le bal des publications des états financiers semestriels des sociétés cotées n’est toujours pas clôturé. Jusque-là la masse bénéficiaire est en repli. Les résultats non encore publiées peuvent inverser la tendance.

Par Mounia Kabiri Kettani

 

Les entreprises cotées ont jusqu’au 31 mars pour présenter leur bilan au titre de l’exercice 2018. A deux jours de l’ultimatum, certains groupes manquent à l’appel. Les résultats de BMCE Bank of Africa et d’Alliances, grands opérateurs de la place, ne seront dévoilés que le 2 Avril. La prudence reste de mise. Les analystes ne veulent pas livrer des analyses hâtives. Ils attendent tous, le bouclage de l’opération pour se prononcer.

L’Observateur du Maroc et d’Afrique a sondé quelques-uns qui ont accepté de nous donner une première lecture des résultats publiés jusqu’au 28 Mars, a deux jours de l’échéance exigée. En gros, d’après l’équipe d’analyse & recherche du Crédit du Maroc, sur 41 sociétés cotées ayant publié leurs comptes annuels, 21 entreprises seulement ont clôturé, l’exercice 2018 sur des bénéfices en croissance. Les analystes du même groupe que les sociétés cotées de la place casablancaise ayant publié leurs résultats annuels de l’exercice 2018 ont généré une masse bénéficiaire en repli de -0,8% à 25,1 Mrds MAD. Et d’ajouter que cette quasi-stagnation trouve, essentiellement, son origine dans les évolutions mitigées des activités d’un nombre non négligeable de sociétés cotées face à un contexte économique en pleine mutation.

Cette légère contre-performance s’instaure avec l’avalanche des alertes sur les résultats d’entreprises s’attendant à des contractions de leurs bénéfices en 2018. Un autre analyste chevronné d’un grand groupe de la place confie à l’Observateur du Maroc et d’Afrique que cette baisse était plutôt attendue. A cause notamment de l’impact du boycott. « Certaines valeurs ont été touchées directement et d’autres indirectement. Hormis les entités concernées par ce boycott, d’autres surtout opérant dans le secteur agroindustriel ont baissé leur rythme de communication sur les produits par crainte d’être touchées à leur tour par le phénomène », explique notre source.

Et d’ajouter « l’impact a été ressenti en T3. On s’attendait à un rattrapage lors du T4 à cause de la fin du mouvement. Le coût important au T3 a été compensé en T4 sur le plan commercial et en termes de ventes. Mais il y a eu un autre coût additionnel lié au redressement fiscal dont a fait l’objet bon nombre de sociétés cotées ». Notons que depuis le début de l’année, plusieurs sociétés cotées ont publié des profit warnings tels que Addoha, Saham Assurance, Sonasid, Fenie Brossette, anticipant ainsi un ralentissement de leurs agrégats à cause entre autres du redressement fiscal.

 

Des évolutions contrastées

 

D’après la cellule d’analyse & recherche du Crédit du Maroc, cette contre-performance occulte des évolutions contrastées des différents secteurs composant la cote et permet, par la suite, de scinder temporairement ces derniers en deux sous-groupes : d’abord les secteurs contribuant positivement à cette croissance bénéficiaire, à savoir : Banques, sociétés de financement, Holding, Chimie, Industrie Pharmaceutique, Distributeurs, NTI, Télécoms, Services aux collectivités, Electricité et Sociétés de placement Immobilier. Ensuite, il y a les secteurs tirant vers le bas la croissance bénéficiaire de la cote casablancaise, tels que les Assurances, Pétrole & Gaz, Mines, Boissons, Agroalimentaire, BTP, transport et Services de transport.

Dans le détail, pour le secteur bancaire, un autre analyste de la place, explique qu’en attendant les résultats de BMCE Bank, l’activité semble se porter bien. En effet, les bénéfices d’Attijariwafa bank sont en progression de 5,8% par rapport à 2017. Son PNB a crû de 3,4% à 22,4 milliards de dirhams. Les bénéfices de la BCP sont en hausse de 3,5% à 2,9 milliards de DH en 2018 découlant d’un produit net bancaire de plus de 17 milliards de DH, en progression de 4% par rapport à 2017. De son côté, CIH Bank a enregistré un produit net bancaire consolidé de 2,25 milliards de DH en croissance de 10,5%. La banque a engrangé 455 millions de DH de bénéfices. Même tendance pour les télécoms où l’opérateur coté Maroc Télécom a enregistré une hausse de 5,3% de son résultat Net part du Groupe et une amélioration de 49,6% de sa profitabilité. Les mines, l’immobilier, le BTP, les assurances et l’agroalimentaire sont en net recul.

Les résultats de Managem et de sa filiale SMI expliquent les contre-performances du secteur des mines. Au titre de 2018, le chiffre d’affaires de Managem ressort à 4,36 milliards de dirhams, en retrait de 16% par rapport à 2017 et les bénéfices sont en chute de 57,9%. « La baisse importante des cours des métaux et le repli de l’activité de la minière d’Imiter ont lourdement impacté les résultats du groupe », relève notre analyste. Pour les assurances, le recul est dû, selon les analystes à deux facteurs clés : la contre-performance du marché boursier en 2018 et la hausse de la sinistralité notamment sur l’automobile. Pour l’immobilier et le BTP, l’explication fournie par l’analyste est la crise que connait le secteur couplée à la chute des ventes ciments à 3,6% à fin 2018.

Pour l’agroalimentaire, comme précité, la baisse était attendue. Par exemple le boycott qui avait touché Centrale Laitière courant 2018 a considérablement altéré les principaux indicateurs du groupe à fin 2018.

Sans surprise, le chiffre d’affaires s’est ainsi établi à 4,76 MMDH, en baisse de 27% par rapport à l’exercice 2017. L’excédent brut d’exploitation courant consolidé a, quant à lui, plongé de 75% pour se limiter à 179 MDH. Même cas pour le Groupe Les Eaux Minérales d’Oulmès dont les ventes ont accusé un net recul de 19,7%. Les résultats de Lesieur Cristal n’étaient pas au RDV non plus. Et elle l’a déjà annoncé dans un profit warning. En chiffres, le groupe a réalisé un résultat net de 118 millions de dirhams (MDH) en repli de 34% par rapport à l’exercice 2017, et un chiffre d’affaires en retrait de 8% à cause notamment de l’évolution dans un contexte économique difficile marqué par un ralentissement des marchés de grande consommation et une tendance baissière des cours de matières premières (-10%).