Analyse - Le Boeing 737 MAX est trop gros pour échouer

La réduction de production chez Boeing va probablement peser sur la croissance du PIB ce trimestre, mettant en évidence son poids économique alors même que les plaintes se multiplient.

Par Jon Sindreu

L’avion 737 MAX n’est pas seulement important pour Boeing, (BA + 0,76%). Il compte également pour les compagnies aériennes et même pour l’économie américaine. Ce qui place le constructeur aéronautique dans une position de force, alors même que les plaintes se multiplient quant à la manière dont la compagnie a traité les problèmes de sécurité.

Les avertissements des lanceurs d’alerte concernant l’avion ont continué de se manifester ce week-end. Il devient évident que la compagnie a agi d’une manière opaque auprès des autorités de réglementation et des compagnies aériennes dans ses explications sur les dispositifs de sécurité de l’avion.

Cependant, la preuve de l’importance de l’avion dans l’économie américaine peut décourager les autorités de punir l’entreprise plus que ce qui est strictement nécessaire. Les données officielles ont montré jeudi une baisse des livraisons d’avions en mars. Certains économistes voient dans ce détail, énoncé dans un rapport des biens durables, par ailleurs encourageant, le premier signe que l’immobilisation au sol du 737 MAX de Boeing a un impact macroéconomique faible, mais visible. L’avion est cloué au sol depuis mars, date à laquelle un deuxième accident mortel a été associé à son système anti-décrochage. Les livraisons du 737 MAX ont ensuite été arrêtées et la production réduite d’environ 20%. Boeing attend l’approbation des modifications sur le système de vol de son 737 MAX par les régulateurs. Néanmoins, plusieurs compagnies aériennes ont décidé ne pas le faire voler avant le mois d’août au moins.

Le 737 MAX a représenté près de la moitié des commandes de Boeing au cours des dernières années, stimulant considérablement les exportations américaines. Les ventes d’avions au reste du monde s’élèvent à plus de 50 milliards de dollars par an. Et, comme l’a souligné Neil Thomas, chercheur au Paulson Institute, le secteur des avions commerciaux de Boeing est considéré comme un ambassadeur de premier plan des

intérêts économiques américains à l’étranger, en particulier en Chine.

Les compagnies aériennes dépendent également de cet avion. La plupart ne peuvent

pas réellement passer du 737 MAX à un avion concurrent, comme l’Airbus A320, car ils utilisent beaucoup d’autres produits Boeing. Les données publiées vendredi sur le produit intérieur brut (PIB) du premier trimestre n’ont pas été affectées par la crise, probablement parce que la compagnie n’a réduit sa production qu’en avril. Toutefois, au deuxième trimestre, les dommages causés aux dépenses en équipements et aux exportations - non totalement compensés par les réserves de stock d’avions non livrés -

risquent de réduire la croissance économique américaine d’environ un cinquième de point de pourcentage, selon les analystes de Wells Fargo Securities et de Goldman Sachs.

Il s’agit d’un faible impact, qui serait inversé partiellement au troisième trimestre si Boeing augmente à nouveau sa production. Néanmoins, toutes les entreprises ne peuvent se vanter de figurer dans les données du PIB.

Les investisseurs peuvent s’attendre à des titres médias plus dramatiques pour Boeing.

L’avionneur doit de toute urgence améliorer ses relations avec les compagnies aériennes et les régulateurs afin de sécuriser son carnet de commandes pluriannuel d’avions. Il est également à craindre qu’un examen minutieux de la certification ne fasse augmenter les coûts. En premier lieu, cela pourrait affecter des programmes tels que le 777X et le projet d’un nouvel avion intermédiaire.

Cependant, les actionnaires peuvent trouver un certain réconfort dans le degré de puissance hors du commun du groupe sur le marché et sur le plan politique. Les compagnies aériennes et les responsables gouvernementaux ont également toutes les raisons de trouver une solution. Le Boeing 737 Max est tout simplement trop gros

pour échouer.