Libre cours
Naim KAMAL

LORS DE L’ÉMISSION « CHOU’OUNE AMAZIGHIA » (Questions amazighes) qu’anime l’activiste berbériste Ahmed Assid, des militants de la cause ont plaidé pour que le droit marocain s’inspire du droit coutumier berbère, nommé pour l’occasion droit positif amazigh. Il serait d’un grand apport pour la justice marocaine et pour la dignité des citoyens. Sa tolérance a fait ses preuves puisqu’il a pu coexister avec toutes les religions célestes ; juive, chrétienne et musulmane. Je vois d’ici les cris d’orfraie que vont pousser les islamistes et les extrémistes de l’arabité. Les activistes amazighs veulent ressusciter le funeste dahir berbère par lequel le protectorat français voulait diviser le Maroc. De là à appeler à la lecture du latif, il n’y a qu’un pas à faire et qu’ils feront allégrement si la revendication prend de l’ampleur.

EN RÉALITÉ, LES BERBÉRISTES ne font que rendre aux islamistes la monnaie de leur pièce. C’est le contre poids idéal pour leur revendication d’aller chercher l’inspiration des lois marocaines dans la charia. Match nul qui arrangerait bien le législateur désormais en mesure de les envoyer dos à dos. Entendez vous d’abord, je trancherai par la suite. In fine, ce sera un remake de la bataille pour le choix d’un alphabet à la langue amazigh. Latin ou arabe ? Ce sera tifinagh ? Appliqué au domaine de la loi, je ne sais pas ce que ça donnera mais ce sera toujours un moyen d’apaiser les tensions, fut-ce momentanément, d’une société qui se cherche de nouveaux consensus.

IL VA DE SOI QUE LE DROIT COUTUMIER amazigh est très différent de la charia. Il est pour la pluralité et la diversité, défend la liberté de conscience, la participation à la vie politique et culturelle, l’égalité entre la femme et l’homme etc. En somme, rien que puisse renier un laïc non amazigh, encore une fois qui n’est pas synonyme d’athéisme, ou même un islamiste bon teint. La seule divergence qui peut survenir entre les deux camps se rapporte à la femme battue. Le droit coutumier amazigh prévoit une amende pour l’homme qui violente la femme là où les modernistes réclament de la prison ferme.

EN DEHORS DE CE LÉGER DIFFÉ- RENT, il n’y a rien à redire, ou plutôt si, deux petites choses. Il semble que les amazighs ont accumulé à travers les siècles un véritable arsenal juridique, ce dont je ne doute pas, mais j’aimerais le voir codifié ; et il paraît que ce même droit prévoit des dispositions pour l’autodétermination. Et là, je commence à avoir peur, ça sent le souffre et quelque chose qui ressemble à du séparatisme. Le débat ne fait que commencer.