Foot-ball et sentiment National
Ahmed Charai

Par Ahmed Charaï

Alors que l’Algérie connait une véritable révolution où le peuple, par millions, exprime chaque semaine sa volonté de changer de régime, son désir de démocratie, cette ébullition n’empêche pas les Algériens de suivre la coupe d’Afrique des Nations et exprimer leur fierté, leur gratitude à leur équipe.

« Les fennecs », c’est comme cela qu’on appelle la sélection algérienne, sont devenus les favoris de la coupe d’Afrique. Ils sont irréprochables sur et en dehors du terrain. Ils sont en majorité issus des centres de formation des clubs algériens. L’entraîneur, ancien international, a su leur insuffler un esprit combatif, un grand engagement et la discipline nécessaire. C’est une équipe qui fait plaisir à tous les amateurs de foot. Les Algériens, même si les enjeux de la situation politique sont autrement plus importants, savourent cet instant et veulent y voir l’annonce d’une Algérie nouvelle, triomphante.

A Madagascar, c’est une vraie folie qui s’est emparée de l’île. L’équipe malgache est la vraie surprise de la compétition. Chaque victoire est fêtée dans la liesse générale. Dans ce pays, qui n’a jamais été une puissance footballistique, on a installé dans les villages des télévisions pour offrir le spectacle. Madagascar vit au rythme des exploits de son équipe.

Il y a dans les deux cas un travail de formation, des équipes compétentes et une interprétation raisonnée de la relation du foot- ball et du sentiment national, sans tomber dans le chauvinisme.

La réalité incontestable, c’est que les performances sportives impactent réellement la vie des nations. Au Brésil, la défaite 7-1 devantl’Allemagneafaitpleurermêmelesgrands-mères.Le pouvoir politique a été tenu pour responsable. Les déceptions sportives se transforment en catastrophes nationales. Les victoires subliment la fierté du vivre-ensemble. Souvenons-nous de la victoire de la France en 1998. Le concept de la France Blanc-Black- Beur a émergé à cette occasion. Pour beaucoup, ce mouvement n’a pas été saisi par les politiques qui auraient pu en faire un projet sociétal. L’INSEE, l’Institut des statistiques français, estime que la victoire de la France, a rapporté un point de croissance, parce que les gens, optimistes, heureux, ont consommé plus.

La règle du sport c’est qu’il y a un vainqueur et un vaincu. La détresse de l’un est aussi importante que le bonheur de l’autre. Mais, parce que ce sentiment concerne des nations et non pas uniquement les joueurs sur le terrain, cela devient un phénomène politique. Aucune instance sportive ne peut nier cet impact. Les joueurs qui ont l’honneur de porter les couleurs nationales non plus. C’est ce que l’entraîneur algérien a réussi à transmettre à ses stars, y compris les plus célèbres.