Futura 2000 conçoit son cube pour la Biennale de Rabat

Futura 2000 conçoit son cube pour la Biennale de Rabat

Invité spécial de la Biennale de Rabat, le graffeur iconique new-yorkais ayant exposé aux côtés d’Andy Warhol, de Jean-Michel Basquiat et de Keith Harring, le premier à avoir mêlé avec audace graffiti et expressionnisme abstrait, nous parle de son nouveau cube coloré, monté et exposé en contraste avec plusieurs œuvres d’artistes marocains : Ghizlaine Agzenai, Yassine Balbzioui, Mehdi Zemouri, Iramo Samir et Ed Oner, dans le parc public Hassan II à Rabat.

Agé de 63 ans, le père du graffiti abstrait, le 1er à avoir tagué les métros de New York, a marqué l’histoire du graffiti américain dans les années 80’s et propose une alternative au travail classique de la lettre, avec la réalisation d’œuvres abstraites. Avec ses 40 ans de carrière, Leonard Hilton McGurr aka Futura 2000 est l’un des premiers artistes à commencer un travail en atelier, sans jamais abandonner la rue. Figure emblématique du passage de la rue aux galeries, il est incontestablement respecté dans le milieu de l’art, tant par ses pairs qu’auprès des collectionneurs.

Membre de « United Graffiti Artists », il collabore également au projet Lasco, qui vise à créer un dialogue entre des street artistes reconnus et une nouvelle génération d’artistes. Il était donc évident de l’inviter à cette 1ère édition de la Biennale de Rabat où il a eu carte blanche pour créer son œuvre, faisant partie d’une installation géante regroupant les œuvres de 5 artistes marocains, qui ont tous ont eu le champ libre pour apporter, chacun à sa manière, leur empreinte artistique au cube 3m3 et aux cimaises.

Résultat, 2 cubes, 2 faces par artiste, 2 cimaises et un monde de possibilités de dialogue créatif entre des artistes qui viennent de backgrounfs différents bien que sous le chapeau du street art : le graffiti, le figuratif, le géométrique et l’abstrait.

Ces structures géométriques géantes et pluridimensionnelles symbolisent ainsi, chacune les facettes multiples que peut prendre l’art dans l’espace public. Ils symbolisent aussi l’échange et la communication que peuvent avoir deux artistes sans empiéter l’un sur les plateformes de l’autre. Les cubes et les cimaises se fondent dans le milieu naturel du moment. Accueillis pendant 3 mois dans le nouveau jardin public de la capitale Hassan II, les œuvres seront pensées de manière à être mobiles et à pouvoir avoir une seconde vie artistique ailleurs, en étant par exemple déplacés par la suite dans d’autres lieux de la ville. A l’unité ou dans leur ensemble.

Ça vous fait quoi d’exposer pour la 1ère fois à la Biennale de Rabat ?

Lorsque Mehdi Qotbi m’a proposé de créer une œuvre pour une exposition publique au sein du parc Hassan II dans le cadre de la Biennale de Rabat, j’étais plus que ravi et j’ai accepté son offre avec joie. Vous savez, j’ai déjà été au Maroc 3 ou 4 fois avant, aujourd’hui, j’ai 63 ans, et vu mon histoire avec le Street Art, je peux vous affirmer que ce que j’ai vu à Rabat, c’est très intéressant, les graffitis sur les bâtiments,… c’est très positif pour les jeunes. Moi, j’ai débuté dans les 70’s dans le métro de New-York et je vois que 40 ans plus tard, le mouvement continue de s’étendre à d’autres continents même au-delà des USA et c’est une excellente chose.

Comment avez-vous abordé votre cube exposé dans le parc Hassan II ?

Je voulais faire quelque chose en contraste avec les autres œuvres exposées dans le parc. Vous savez, tout ce que je fais est totalement spontané, j’ai plusieurs techniques, plusieurs capacités, du coup, le résultat est à chaque fois différent. L’autre jour, en finalisant mon œuvre, il y avait plusieurs enfants avec leur famille qui s’arrêtaient pour contempler mon travail. Je suis content que ça les a interpellé et j’aimerais qu’à l’avenir, les enfants s’inspirent de cette expérience et que ça leur donne envie d’exposer à leur tour ici leurs œuvres….à l’image de Banksy ou autre !

Qu’est ce qui vous a inspiré pour les couleurs ?

C’est en fait une palette de couleurs, ça renvoie à quelque chose que j’avais fait il y a très longtemps dans le métro de New-York, quand j’avais 25 ans. Ça peut s’apparenter au coucher du soleil, un truc en rapport avec le feu, …mais je voulais surtout que ça soit en contraste avec le vert du parc, et aussi…avec le travail des autres exposants (Yacine par exemple), qui à mon sens, sont plus sombres. Ici, je me sens comme dans mon atelier, …mais bon, peu importe l’espace, et comme ça s’adresse avant tout aux enfants, je ne voulais pas faire quelque chose d’agressif, comme ce que j’ai l’habitude de faire, je voulais être soft, inoffensif, passif.

Je suis quelqu’un de créatif, c’est quelque chose qui émane de moi en tant que personne avec tout mon vécu mais dans ce contexte là, il n’y a pas vraiment de message derrière, j’ai fait quelque chose que je ressens, c’est très calme. Et esthétiquement parlant, soit on aime, soit on n’aime pas !

L’œuvre porte t-elle un nom ?

Non, pas vraiment. Quand j’étais jeune, toutes mes oeuvres portaient un nom, parce que ça m’aidait non seulement à constituer mon catalogue mais aussi à me rappeler de mes peintures. Pour moi, c’est comme mes enfants, ils existent avec quelqu’un, ils vivent dans un endroit donné, peut être un lieu public, ou dans une pièce de collection. Ce jardin public, c’est un lieu sécuritaire, protégé, alors que tout ce qui est à l’extérieur, dans l’espace public est sujet à une réaction publique, par exemple, si je fais cela en ville, les gens peuvent la changer, l’altérer, je connais cet esprit de la jungle. Les gens qui regardent l’œuvre veulent aussi s’exprimer, donc, ils veulent laisser leur empreinte, c’est une sorte de réaction. J’ai longtemps été confronté à cela et je le comprends parfaitement, aujourd’hui, les gens s’expriment sur les médias sociaux, certains haïssent ces plateformes parce que les réactions sont négatives. Moi, je crois qu’il faut rester positif surtout pour les générations futures, les enfants sont notre futur.

Vos projets au Maroc ?

Je vais probablement travailler sur un projet avec la Galerie 38 à Casablanca, ils ont une excellente plateforme, avec un théâtre, des ateliers de musique, de peinture, de danse,… pour enfants. C’est génial, je supporte et encourage ce genre d’initiatives, parce qu’à la fin, c’est la créativité qui doit primer et on doit lui fournir un espace pour s’exprimer, c’est ce qu’on transmet aux gens qui ont besoin d’éducation et d’orientation, une sorte de direction à suivre.

Accroche

Le niveau de Street Art que j’ai vu à Rabat est très intéressant.