La catastrophe
Ahmed CHARAI

Le chômage n’est pas un chiffre, une statistique, c’est surtout des vies délabrées. On assiste, de plus en plus, à la radicalisation du mouvement des diplômés chômeurs qui n’hésitent plus à attaquer physiquement les responsables. On ne peut que condamner de tels agissements. Ceux qui usent de populisme, alors qu’ils ont été aux affaires, sans pouvoir régler le problème sont dans une position indigne. La part de la masse salariale dans la fonction publique ne cesse d’augmenter. Non, l’Etat ne peut pas offrir un emploi à tous les jeunes. C’est une vérité. De la même manière, il est juste de refuser tout recrutement en dehors de concours. Cependant, il y a deux axes sur lesquels l’exécutif doit agir et sans attendre. Le premier concerne l’aide à l’employabilité. Il faut assumer l’échec du système éducatif.

Les détenteurs de diplômes universitaires n’ont pas de qualifications pour trouver un emploi dans le privé. Ils ont besoin d’une formation complémentaire qui leur permette de postuler auprès des entreprises. Le ministère de l’Emploi avait entamé une réflexion à ce sujet. Le second axe est plus facile à mettre en oeuvre. L’emploi ne se décrète pas. On se rappelle de l’engagement de la CGEM, du temps de Lahjouji, à recruter 100.000 jeunes. Engagement qui n'a pas été tenu. La nouvelle présidente de la CGEM, Miriem Bensalah, défend une idée plus rationnelle à ce sujet. Car, il y a moyen d’encourager les entreprises à donner leur chance à des jeunes, même quand leur CV contient des lacunes. En France, plusieurs dispositifs ayant trait aux charges sociales, au soutien à la formation, à la défiscalisation du premier emploi, ont été mis en place. Le privé est animé par des considérations purement économiques.

Il est illusoire de croire que les patrons vont recruter pour des raisons politiques, même si, dans leurs discours, ils sont de plus en plus nombreux à revendiquer une responsabilité citoyenne, ce qu’il faut souligner et encourager. Mais seul un dispositif incitatif peut les encourager à prendre le risque « jeune », c'est-à-dire, un potentiel à renforcer avant qu’il ne soit productif. Le discours officiel ne prend pas. On ne peut pas dire à des dizaines de milliers de jeunes : votre formation étant financée par le contribuable, vos efforts académiques ne valent pas un emploi digne. La fonction publique, même dans un Etat rentier comme l’Algérie, n’a pu offrir une solution à tous les jeunes qui arrivent sur le marché du travail. La justice sociale voudrait qu’on aide le secteur privé à les recruter, en leur assurant une formation complémentaire et en soulageant les charges sociales. On ne peut pas dire à un chômeur : « On ne peut rien pour toi ! »