Colère à Draa Tafilalet : «Choubani viole la constitution»

 

La session ordinaire du conseil de la région Draa Tafilalet prévue le 6 juillet à 10H a été annulée sur décision du président de la région, El Habib Choubani. L’opposition est catégorique, le PJDiste est allé trop loin.

 

Mounia Kettani

 

«Après 30 minutes de retard, El Habib Choubani a pris un micro baladeur et a annoncé depuis les couloirs, l’annulation de la session ordinaire du conseil de la région », explique Lahou Marbouh, membre du conseil régional de Draa Tafilalet et parlementaire à la Chambre des conseillers.

Choubani justifie sa décision par le non-respect des mesures de sécurité requises dans la cadre du covid-19. Il accuse même ouvertement certains membres du viol volontaire de ces mesures pour entraver la tenue de la session qui aurait permis, selon lui, le lancement de projets structurants pour la région.

«C’est un pur mensonge», martèle Lahou. Il assure que toutes les conditions ont été respectées, notamment la désinfection des lieux, le port de masques, la distanciation sociale…  «Ce sont des obligations qui ne se discutent pas. Il ne faut pas en faire des prétextes pour prendre des décisions qui n’ont aucun fondement», poursuit-t-il. Et d’ajouter: « nous avons assisté, durant les quatre dernières années, à des violations de la loi et on a toujours dénoncé cela.  Aujourd’hui, l’acte est plus grave. Choubani est en train de violer la constitution».

Fuite en avant

Un autre membre du conseil regrette la mauvaise organisation de Choubani. «Il aurait pu choisir une autre salle d’une capacité de  plus de 1.000 personnes et où il est facile de mettre en place toutes les mesures de distanciation nécessaire… Or, il a opté pour le complexe culturel de la ville qui a été construit par des Qataris». Il fait donc endosser toute la responsabilité de la mauvaise organisation au président du Conseil.

Notre source précise que les trois membres du Conseil (2 représentants du PPS et un du RNI) que Choubani accuse d’avoir entravé la tenue de la session pour non-respect de distanciation sociale, ont claqué la porte au nez du président en rejoignant l’opposition.

Nos interlocuteurs estiment que Choubani aurait pu juste retarder la session jusqu’à la mise en place des règles nécessaires, mais au lieu de cela, il l’a vite reportée et ce n’est pas la première fois qu’il se hâte d’agir ainsi. La dernière session de mars a été elle aussi suspendue juste à cause de ses sautes d’humeur. «Il a  décidé de tout arrêter parce qu’il était énervé et a même lâché qu’il n’était plus président», se rappelle Lahou qui reproche au président de prendre des décisions unilatérales.

 

Gestion hasardeuse 

La question n’est pas de lever ou annuler la session, selon les élus en colère, mais il y a plus grave. «Choubani n’a plus la majorité et perd sa crédibilité», affirment ses opposants. D’autres membres du conseil le qualifient de «dictateur». «Le président de la région veut faire la pluie et le beau temps dans la région et impose sa propre vision sans la moindre concertation avec les autres membres», expliquent-ils.

Après plus de quatre années à la tête de la région, Choubani  a créé l’unanimité contre lui. Alors qu’il fait glisser le Conseil vers des batailles inutiles, la région qu’il préside ne dispose pas de schéma régional d’aménagement du territoire (SRAT). Elle n’a même pas de programme de développement (PDR).

«Cela fait quatre ans qu’on réclame solennellement le SART, en vain.  Pour le PDR, Choubani a fait appel à un bureau d’études pour la préparer. Nous avons émis une série de remarques à ce bureau qui n’a donné aucune réponse jusque-là. Finalement, nous avons compris que c’est le président qui ne veut pas de PDR parce qu’il veut programmer ce qu’il veut quand il veut», confie Lahou.

Un autre membre ajoute que même pour la session annulée, les projets qui étaient inscrits à l’ordre du jour avaient été décidés sans concertation avec les autres membres.

Côté finances, il n’y a pas d’enveloppe prévue pour la simple raison que le budget a été refusé par le Conseil.  «On n’arrête pas de voter des conventions et des projets pour relancer la région, mais rien n’est jamais exécuté. Si on cumule tout ce qui a voté sans qu’on voie rien venir, on atteint un total de près de 4 milliards de dirhams», déplore Lahou. D’autres intervenants dans la région confirment que Choubani n’en fait qu’à sa tête. Ils donnent comme exemple de transport scolaire qui aurait nécessité quelques 60  millions de dirhams à la Région. Le PJDiste l’aurait lancé sans tenir compte d’aucun autre avis que le sien.