Meurtre du petit Adnane : Quand le drame devient « une marchandise »

Des commerçants en ligne ont profité du drame du petit Adnane pour vendre sur les réseaux sociaux un tas de produits portant le nom et la photo de la victime. Les internautes sont scandalisés. Mais qu’en pense la CNDP ?

Mounia Kabiri Kettani 

 Le malheur des uns fait le bonheur des autres, paraît-il. Et il y a ceux qui ne  perdent pas leur temps et profitent de toute occasion quitte à surfer sur un drame pour gagner de l’argent. Comme c’est le cas de ces commerçants en ligne qui ont commencé,  le soir même de la découverte du corps du petit Adnane, la commercialisation de tee shirts et de bavettes portant sa photo avec la mention « Justice for Adnane », à des prix variant entre 120 et 150 DH. Les internautes sont sous le choc et déplorent la cupidité de ceux qui cherchent à "profiter" du drame pour faire fructifier leurs affaires. « La bêtise humaine n’a pas de limites. Surfer sur ce drame pour gagner de l’argent me laisse sans voix », estime t-il. Une autre ajoute «ce qui me dérange le plus dedans, c’est le mot collection pour cette saison. Donc, il doit y avoir une collection pour justice contre viol, pédophilie, violence conjugale…j’aurai adhéré s’il y avait une action pour aider la famille ou une association, mais là c’est juste abjecte ».

                              

Avis de la CNDP 

Ce que ces commerçants ne savent pas c’est qu’ils profitent du nom de la victime et utilisent sa photo pour des fins commerciales, sans consentement de la famille. N’est ce pas une atteinte à la vie privée ? Que dit la loi dans ce sens? Le président de la commission Nationale de contrôle de protection des Données à caractère Personnel (CNDP), Omar Seghrouchni est catégorique : « Si les choses sont faites à l’insu de la famille, manifestement c’est une atteinte à la vie privée. D’un point de vue moral, la réponse est sans équivoque. D’un point de vue juridique stricto sensu, la réponse est beaucoup plus complexe. Je ne connais pas encore le statut judiciaire de cette affaire. La famille pourrait invoquer un préjudice moral », explique t-il. . Concrètement, il existe selon Omar Seghrouchni  plusieurs dispositifs pour encadrer le droit à la vie privée, garantie par l’article 24 de la Constitution. « il y a la loi 09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel. Et également la loi n°103-13 entrée en vigueur en septembre 2018 ainsi que les articles 447-1, 447-2 et 447-3 du code pénal. Sans parler d’autres dispositifs », détaille t-il. Avant d’ajouter que « la protection des données à caractère personnel est, d’un point de vue juridique, un sous-ensemble de la protection de la vie privée. L’affaire en question donc est au-delà de la loi 09-08 ».