Comment protéger nos enfants des pédocriminels ?

 

Comment combattre la pédocriminalité ? Comment protéger nos enfants contre les attaques de ces prédateurs rôdant dans les rues, sur le net et même dans le milieu familial ? Conseils de professionnels.

 

Par Hayat Kamal Idrissi

 

Quel est le portrait robot d’un pédocriminel ? Comment peut-on reconnaitre un pédophile et le détecter avant qu’il ne passe à l’acte? Comment sensibiliser nos enfants et les protéger sans verser dans la phobie ? Tant de questions qu’un bon nombre de parents se posent actuellement au lendemain de la fin tragique de l’affaire Adnane Bouchouf. Après le choc, la douleur, la colère, vient la grande question : Et si c’était mon enfant ? Une question légitime à laquelle de nombreux parents font face en demandant des conseils et en cherchant les bonnes orientations, pour mieux protéger leurs enfants contre un véritable danger.

 

Les prédateurs sont parmi nous

 

« Tout d’abord, on ne peut pas reconnaitre un pédophile ! Ceci pour la simple raison qu’il n’y a pas de portrait type de pédophile. Ça peut être n’importe qui. Il se peut qu’il soit quelqu’un de très proche de nous ! Les pédophiles sont partout, ils sont parmi nous mais on ne peut pas les reconnaitre. Il peut être un grand frère, un cousin, un oncle, un voisin et parfois même le père ou la mère », nous explique Dr Mostafa Massid, psychologue. Pour le clinicien, l’idée d’enfermer les enfants, les surprotéger ne servira absolument à rien. « Si ce n’est créer la psychose en compromettant gravement le développement psychologique de l’enfant », insiste Massid.

De son côté Maria Bichra, Coach familial, rappelle que la majorité des pédophiles sont des récidivistes avérés. « Ce sont des criminels qui même après leur incarcération, ils reviennent  à la charge aussitôt relâchés. Donc au-delà du débat autour du châtiment adéquat et dissuasif que l’on peut réserver à ce type de criminels,  le travail de protection de nos enfants doit se faire au sein de la famille même : La sensibilisation et l’éducation sexuelle sont les meilleurs moyens pour immuniser nos enfants contre ce mal », explique la coach.

 

 

Education sexuelle, la clé

 

Même discours chez Dr Massid. « Effectivement, les pédophiles sont des récidivistes. Lorsqu’on les emprisonne, ils sont juste maintenus, un certain temps, loin de la société sans suivi psychologique ou autre prise en charge psychiatrique. Vu qu’aucun traitement n’est prévu, c’est normal qu’ils soient frustrés. Dès lors qu’ils recouvrent la liberté, la récidive est automatique », analyse le clinicien. Ce dernier est d’ailleurs ferme : « La sensibilisation et l’éducation sexuelle reste le seul moyen de protéger nos enfants. Il faut lever tous les tabous, nos enfants ont besoin de tout savoir sur la sexualité ».

Un moyen qui serait efficace dans la prise de conscience de l’enfant de son corps, de son intimité et surtout dans le respect de son intégrité physique et sa protection contre toute atteinte étrangère. « L’éducation sexuelle c’est quelque chose de global. Il faut tout d’abord que les éducateurs et les parents se posent des questions sur leur propre sexualité. Le développement psychosexuel commence dès la naissance et si l’éducateur lui-même, a une sexualité mal au point, il risque de transmettre ses malaises et des idées erronées à l’enfant », met en garde le psychologue.

 

 

Ne prédisposez pas les enfants à devenir des proies

 

Explications ? D’après Massid, si les interactions physiques entre la mère et le nourrisson, ne sont pas bien contrôlées, si les gestes d’affection dérapent vers l’érotisation du bébé et de l’enfant  ça peut compromettre tout le développement psychosexuel de l’enfant et de l’adulte qu’il sera dans l’avenir. « En des termes plus simples : Ca le prédispose à être une proie facile aux prédateurs dans l’avenir », explique le clinicien.

Pour Maria Bichra, il est très important de parler de sexualité avec les enfants. « Même si ça reste pour beaucoup un sujet délicat  à aborder. Mais il faut s’y mettre. La communication est primordiale dans le processus éducatif en général et encore plus sur ce registre spécifique. Dans mon travail de coaching familial, j’ai toujours demandé aux parents de consacrer 10 minutes par jour à leurs enfants. « The Kid time » : Rien que pour discuter, se raconter. C’est une manière d’instaurer l’écoute et la confiance entre enfant et parents », partage Bichra.

La communication et le rapport de confiance, un point crucial pour le psychologue dans l’éducation sexuelle mais aussi dans le combat contre la pédocriminalité. Badiâa, une mère de famille, a pu signaler et bloquer un pédophile potentiel qui chattait avec sa fille de 14 ans sur un réseau social. Agé de 36 ans et marié, le prédateur harcelait la fillette. Cette dernière se confie à ses parents et dénonce les agissements du pédophile. C’est un cas cité par Maria Bichra et qui démontre comment le rapport de confiance et la communication peuvent limiter l’emprise des pédophiles sur les enfants.

Parents, informez-vos enfants ! 

 

Pour la coach, « les parents doivent remplir ce rôle pleinement. Ils doivent parler à leurs enfants de sexualité, de l’intimité, de la pudeur. C’est pour éviter que l’enfant n’aille  chercher l’information ailleurs et qu’il ne tombe sur des personnes malveillantes ; ou sur des sources pas sûres donnant des informations erronées et des idées dépravées ». De son côté Dr Massid insiste sur l’aspect continu de ce processus. « L’éducation sexuelle est une manœuvre qui se déroule en continu. Ce ne sont pas des séances programmées. C’est un apprentissage continu qui se développe selon l’âge de l’enfant. Curieux, si on lui en parle pas, l’enfant ira chercher l’information ailleurs », met en garde le clinicien.  De son côté Maria Bichra, rappelle l’aspect culturel de la chose.  « Embrasse tonton, embrasse tata… ça doit absolument changer.  On arrête d’encourager l’enfant à embrasser des étrangers. Même pour les parents, embrasser sur la bouche ou sur les parties intimes, c’est absolument proscrit. On n’érotise pas les rapports avec l’enfant », tranche-t-elle.

 

 

Méfie-toi et crie fort !

 

Pour préparer un enfant à s’auto-défendre, les spécialistes conseillent de lui exposer les différentes situations qu’un prédateur peut utiliser pour l’aborder. « Les pédophiles sont malins, rusés et grands manipulateurs. On apprend tout d’abord à l’enfant à ne jamais parler à un étranger même lorsque ce dernier l’aborde et insiste ; en se passant pour malade ou ayant besoin de son aide », conseille Massid. Si cet étranger veut utiliser la force, on apprend à l’enfant de se mettre à crier. « Ces prédateurs sont lâches, si l’enfant se met à crier, ils prendront aussitôt la fuite… Il faut que les enfants le sachent », ajoute-t-il.

Mais les pédocriminels ne sont pas toujours des étrangers. Le milieu familial ou le voisinage représentent aussi une véritable menace. « Les parents doivent apprendre à leurs enfants, de dire non à toute personne même proche. Il est proscrit de partir avec qui que ce soit, quelque part,  sans autorisation des parents et sans les informer. On ne laisse personne me toucher ou toucher mes parties intimes, sinon j’alerte mes parents ! On doit incruster ces conseils dans la tête des enfants », conseille le clinicien. Ce dernier en appelle d’ailleurs à ce faire dans une ambiance rassurante  sans toutefois tomber dans la psychose. « On veut protéger nos enfants mais sans compromettre leur développement psychique et leur sérénité », conclut le psychologue.

 

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