AMALI: Un Projet générateur d’espoir

VIH/SIDA AMALI est un programme destiné aux personnes atteintes du VIH/SIDA et leurs familles pour leur permettre une insertion socio-professionnelle. Témoignages.

AMALI veut renforcer la prise en charge psychosociale des personnes vivant avec le VIH et leur permettre d’acquérir une autonomie financière. Lancé en 2006, cette initiative concerne sept villes : Agadir, Casablanca, Fès, Marrakech, Rabat, Tanger et Taroudant. Le programme sera ouvert à d’autres sites, dont la ville de Meknès à partir de 2014.

Dame courage

Nadia* vit avec le VIH depuis 13 ans. Cette femme de 44 ans aime la vie et les défis. Malgré des épreuves difficiles, elle a toujours su rebondir. En 2000, elle apprend qu’elle est séropositive. « J’ai vécu pendant six ans avec mon mari, sans jamais savoir qu’il était atteint du VIH. Le jour où je l’ai su, il m’a quittée en me laissant dans un sale état », nous confie-t-elle, la voix tremblante. « Au début j’ai paniqué. La maladie était nouvelle au Maroc, je n’avais pas beaucoup d’informations sur la prise en charge et le traitement », se souvient-elle. Nadia résiste. Elle trouve un soutien auprès des équipes de l’ALCS. Son corps répond positivement au traitement. « Je suis en pleine forme et mon poids est normal », se réjouit-elle. Nadia se remarie avec une autre personne atteinte du VIH. « C’était un choix de vie », admet-elle. Nouveau coup dur, son mari décède en 2010. La même année, elle ne cède pas au destin. « J’ai décidé de participer au projet AMALI. J’ai reçu un financement de 10.000 DH pour lancer mon commerce de prêt-à-porter féminin », se rappelle-t-elle. Trois ans après, son petit business lui permet d’avoir des rentrés d’argent régulières. A bord de sa berline, elle fait le tour de ses clients pour livrer sa marchandise. « J’ai remboursé mon premier crédit rapidement et je vais bénéficier, dans les prochains jours, d’un nouveau prêt pour développer mon projet », annonce Nadia avec fierté. Son courage force l’estime de ses clients et son entourage.

« J’ai tenu à réussir cette expérience professionnelle. Le début n’était pas facile. Il fallait se battre », insiste-t-elle.

AMALI bénéficie également aux familles des personnes atteintes du VIH/SIDA. C’est le cas de Fouzia*, 38 ans, de la ville d’Agadir. Son frère, âgé de 45 ans, est atteint du VIH. « Il vit normalement parmi nous. Personne en dehors de notre petite famille n’est au courant de sa maladie. Je le protège », murmure-t-elle. Cette couturière de profession postule à AMALI. En 2011, elle reçoit un premier financement de 15.400 DH pour lancer son atelier de couture traditionnelle. C’est alors un succès commercial. « Le projet s’est développé rapidement. Il y a deux semaines, je me suis installée dans un nouveau magasin pour pouvoir recevoir mes clients. Je termine la première tranche du crédit dans trois mois. Je devrais recevoir une deuxième dans les prochaines semaines », prévoit Fouzia. Avant d’ajouter : « Pour ma part, j’ai gagné en autonomie grâce à ce projet et j’assure à mon frère une vie digne ».

Si le premier objectif de l’insertion professionnelle est réussi dans plusieurs cas, le deuxième objectif de ce programme, qui est celui de la lutte contre la stigmatisation, est loin d’être gagné. Le poids de la société pèse sur le dos de ces personnes. Nadia nous affirme avec une fureur contenue : « La maladie n’a jamais constitué un handicap pour travailler et vivre en paix. C’est la société qui me pose problème. C’est pour cette raison que je préfère ne pas parler à visage découvert de ma maladie. Ça portera un préjudice à ma famille».

Des nouveaux besoins et des difficultés

Le projet AMALI a entamé sa première phase en 2006, sous forme d’un partenariat tripartite entre l’Agence de Développement Social (ADS), l’Association Marocaine de Solidarité et Développement (AMSED) et l’Association de lutte contre le Sida (ALCS). L’ADS co-finance le projet avec l’ALCS et apporte son expertise en matière d’AGR. L’ALCS gère la partie identification et suivi des bénéficiaires. Quant aux associations locales partenaires, elles assurent l’accompagnement en proximité des porteurs de projets.

Pendant les 3 années suivant le lancement du programme, 38 bénéficiaires ont pu mener à bien leurs projets. Ces projets vont de l’épicerie à la couture, en passant par la vente de diverses marchandises. Une évaluation de la première phase a permis une révision du projet et a abouti au lancement d’une 2e phase, démarrée en janvier 2010 et étalée sur 5 ans.

Pour l’ALCS, ce projet répond à des besoins nouveaux depuis l’avènement de la trithérapie qui a considérablement allongé l’espérance de vie et permet aux personnes ayant une infection au VIH de mener une vie normale. « L'ALCS s’est retrouvée confrontée à une nouvelle mission qui consiste à aider ces personnes, ainsi que les personnes vulnérables à l’infection, à accéder à une activité génératrice de revenus ou à un emploi qui leur permettrait de retrouver un statut social et de sortir de l'exclusion et de la pauvreté », explique une source de l’ALCS.

Depuis son lancement, le programme a financé 148 projets à des personnes vivant avec le VIH et à des personnes issues de populations clés. Durant la période 2011-2013, le rythme de financement s’est accéléré pour concerner 81 projets pour un montant de plus de 1,5 million de DH. « Les montants remboursés s’élèvent à 394.450,85 DH pour l’année 2011-2012 soit un pourcentage de 62%. Les remboursements pour 2012-2013 sont en cours », précise la même source. Ce taux de remboursement, ainsi que les faibles capacités des bénéficiaires en matière de comptabilité et de gestion de projet sont les principales difficultés rencontrées lors de ces projets. « Dans certains cas, c’est la détérioration de l’état de santé du bénéficiaire qui représente un obstacle majeur à la pérennité du projet », regrette-t-on à l’ALCS. Malgré tout, les porteurs de projets ne baissent pas les bras, leur leitmotiv : AMALI fait vivre…

* Pour préserver l'anonymat, les noms des personnes ont été changés.