Les youyous des Negafas se transforment en larmes

Impuissance, précarité, charges lourdes, vente de matériel et mobilier de leurs maisons,…la crise du covid-19 a plongé tout le secteur des mariages, dont les negafas dans une grande détresse financière et morale.

Mounia Kabiri Kettani

Des crises, ces professionnelles chargées de parer la mariée et de la faire entrer, en grande pompe, lors des cérémonies de mariage, en avaient pourtant traversées. Mais aucune n’aurait imaginé connaître pareille déflagration. « On a beau être combatif, nous débattre dans tous les sens, chercher des solutions pour payer nos dettes, nos charges et subvenir aux besoins de notre famille, vient un moment où on s’écroule », lâche Malika, une negafa de Casablanca. Elle est dans le métier depuis de longues années. Mais voilà plus que 7 mois que la machine de son activité qui profite à une des milliers de personnes, qui n’ont ni CNSS, ni Ramed, est à l’arrêt total. Avec l’interdiction des mariages et fêtes, le secteur est aujourd’hui l’un des plus sinistrés par la crise liée au covid-19. Malika, comme beaucoup d’autres, est impuissante. Elle a une traite immobilière, des enfants à charge scolarisés…pour survivre, elle a mis en location une chambre de sa maison et a vendu presque la moitié de son matériel. « Je n’ai pas le choix. D’autant plus que j’ai rendu tous les acomptes reçus de la part des clients pour des événements qui n’ont pas eu lieu », déplore t-elle. Toutefois, la situation de Malika semble bien meilleure par rapport à beaucoup d’autres qui n’avaient d’autre choix que de vendre la totalité de leur matériel à perte et se reconvertir vers d’autres activités comme la vente de vêtements ou encore le ménage chez les particuliers et sociétés.

Un coup de massue

De son côté la talentueuse Aicha Roudania, connue et reconnue à Fès et Casablanca dit avoir compté sur le peu d’argent qu’elle avait épargné et les quelques habits traditionnels loués pour les quelques fêtes qui se tiennent dans le respect des restrictions exigées par les pouvoirs publics.  La crise, pour elle, a frappé au mauvais moment. «Habituellement, au début de l’année on se prépare pour la saison : (achat de matériel neuf, des accessoires, renouvellement du stock es tenues…). Les commandes ont été passées et on commençait déjà à recevoir la nouvelle marchandise. Le virus a frappé et les fêtes ont été interdites. Et on devait payer les fournisseurs, qui eux aussi, sont au bord du gouffre », nous explique Aicha Roudania. Les dettes s’accumulent, les charges aussi surtout pour « les negafas qui ont leur propre magasins ». Roudania estime que ces dernières  sont plus touchées que celles qui travaillent de chez elles. «Quand on a un magasin, on a automatiquement des charges fixes (loyer, eau, électricité….) sans parler des taxes fiscales qu’on était obligé de payer sans pourvoir bénéficier d’aucun report ou rallongement de la durée à l’instar de beaucoup de secteurs ».

Pas de visibilité pour les mois à venir. Et les professionnels sollicités ne veulent ni aide, ni soutien. Ils veulent juste reprendre le travail, quitte à autoriser juste les rassemblements de 50 personnes. «Ceci va encourager les gens à célébrer leurs mariages et fêtes avec un nombre restreint d’invités tout en respectant les mesures nécessaires en matière de précaution », insiste Aicha Roudania. Même, si la reprise ne sera guère tâche facile pour bon nombre de professionnels qui doivent, d’après, Malika, racheter tout le matériel nécessaire, vendu durant la covid, pour survivre.