UE : Le Maroc au cœur du nouvel agenda pour la Méditerranée

 

La Commission européenne a adopté, mardi 9 février, un nouvel Agenda pour la Méditerranée qui propose de relancer le partenariat méditerranéen et de libérer le potentiel économique inexploité de la région. Le Maroc pourrait être l’un des grands bénéficiaires de cette nouvelle feuille de route.

Mohammed Zainabi

 

L’Union européenne revoit sa politique de voisinage en Méditerranée, à la lumière des changements géostratégiques enregistrées dans cette région. Le principal est celui de la reprise des relations entre le Maroc et Israël. Ce rapprochement ravive un vieux vœu émis, depuis plus de 25 ans, avec le lancement en 1995 du processus de Barcelone. Les initiateurs de ce processus espérait alors normaliser les relations des pays arabes du bassin méditerranéen avec l’État hébreux, en tant que voisins communs de l’UE. La tentative a échoué, tout comme l’a été plus récemment l’Union pour la Méditerranée qui s’en était inspirée, mais elle renaît aujourd’hui de ses cendres et fait renaître un nouvel espoir de voir la « Maro nostrom » devenir un réel espace de paix et de prospérité partagée. Du fait de sa décision courageuse de reprendre ses relations avec Israël, le Royaume peut jouer un rôle moteur dans ce sens.

Par ailleurs, parce que les enseignements nécessaires ont été tirés de la fastidieuse expérience du processus de Barcelone, le nouvel agenda de l’UE pour la Méditerranée a prévu d’intensifier non seulement la coopération régionale, vue dans son ensemble, avec ses voisins méditerranéens, mais aussi celles bilatérale et transrégionale.

« Il s’agit d’un nouveau point de départ dans nos relations avec nos partenaires du Sud, basé sur des intérêts et des défis communs, et développé en partenariat avec nos voisins », a précisé le Commissaire européen au voisinage Olivér Várhelyi, lors d’une conférence de presse. Ici, « partenariat » n’est pas un mot bateau, mais il répond à une revendication maintes fois exprimées par le Maroc invitant ses partenaires européens d’entretenir des relations d’égal à égal avec le Royaume et le reste du pays dits du Sud.

Tout prête à croire que le nouvel agenda de l’UE pour la Méditerranée a été établi sur de nouvelles bases pour aller vite vers des projets concrets. En témoigne cette autre déclaration de Várhelyi :  «Dans le cadre d'un dialogue étroit avec nos partenaires, nous avons identifié un certain nombre de secteurs prioritaires, qu'il s'agisse de créer de la croissance et des emplois, d'investir dans le capital humain ou d'assurer une bonne gouvernance ».

Vers le renforcement du partenariat UE-Maroc

A travers son nouvel agenda, l’UE se dit prête à contribuer au plan de relance économique du Maroc en cofinançant des investissements financés dans le cadre du Fonds pour les investissements stratégiques mis en place par le Roi Mohamed VI. Dans cette perspective, il a été ffirmé que le Fonds européen pour le développement durable Plus (FEDD+) sera mobilisé, de même que des ressources provenant d’autres institutions financières européennes, afin de contribuer aux opérations financées au titre du Fonds pour les investissements stratégiques.

L’UE veut aussi appuyer le Royaume pour la réforme de l’enseignement supérieur. Elle entend également renforcer son soutien au déploiement d’un système marocain de protection sociale moderne et juste. De même, elle affiche sa volonté de soutenir les efforts déployés par le Maroc pour atteindre ses objectifs ambitieux en matière d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique et d’utilisation efficace des ressources en eau.

En outre, l’UE annonce sa disponibilité à aider le Maroc à devenir membre associé du programme de recherche Horizon Europe.

Par ailleurs, parallèlement au financement par l’UE des infrastructures numériques et au renforcement de leur fiabilité, de leurs capacités et de leur sécurité, l’UE s’engage à soutenir l’écosystème numérique et d’innovation.

Ce n’est pas tout, l’UE compte également contribuer à l’initiative « Génération Green 2020-2030» et veut soutenir les efforts visant à stimuler la productivité et la compétitivité du secteur agricole. Il s’agit en l’occurrence d’un chantier lancé par le Souverain dans le but de révolution le monde agricole en créant une classe moyenne rurale. Il s’agit donc à la fois d’un projet socio-économique doublé d’un projet sociétal déterminant pour l’avenir du pays. Pour rappel, plus de la moitié de la population marocaine vit dans le monde rural.

Zoom sur «Génération Green 2020-2030»

Le13 février 2020, le Roi Mohammed VI, accompagné du Prince Héritier Moulay El Hassan, a présidé, ce jeudi, à la province de Chtouka Ait Baha, la cérémonie de lancement de la nouvelle stratégie de développement du secteur agricole baptisée «Génération Green 2020-2030» et de celle relative au développement du secteur des eaux et forêts du nom de "Forêts du Maroc”.

A cette occasion, le ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts a souligné que la nouvelle stratégie se base sur une capitalisation des acquis réalisés par le Plan Maroc Vert, à travers l’adoption d’une vision nouvelle du secteur agricole, la consécration d’une nouvelle gouvernance et la mise à disposition du secteur de moyens modernes.

Aziz Akhannouch a affirmé qu’il s’agira de valoriser l’élément humain, conformément aux hautes orientations royales, à travers l’émergence d’une nouvelle génération de classe moyenne agricole (350.000 à 400.000 ménages). Le ministre a aussi annoncé que l’autre objectif escompté est de voir émerger une nouvelle génération de jeunes entrepreneurs, via la mobilisation et la valorisation d’un million d’hectares de terres collectives et la création de 350.000 postes d’emploi au profit des jeunes.

Cette classe moyenne et ces jeunes agriculteurs pourront également recourir à une nouvelle génération d’organisations agricoles plus innovantes et bénéficier de nouvelles mesures d’accompagnement leur permettant de renforcer leurs compétences, a assuré le ministre. L’idée des start-ups agricoles a été lancée dans le sillage de cette réflexion.

Akhannouch a aussi expliqué que la nouvelle vision prévoit la consolidation des filières agricoles, en vue de la multiplication des exportations et du PIB-agricole pour atteindre 200 à 250 milliards de DH à l’horizon 2030, l’amélioration des process de distribution des produits à travers la modernisation de 12 marchés de gros et des marchés traditionnels.

Il s’agit également du renforcement de la résilience et la durabilité du développement agricole, ainsi que l’amélioration de la qualité et de la capacité d’innovation, a relevé le ministre, notant qu’il est prévu dans ce cadre l’octroi d’autorisation à 120 abattoirs modernes et le renforcement du contrôle sanitaire.

La réalisation de cette stratégie nécessitera une augmentation annuelle du budget du secteur de près de 2,5% et ce à partir de l’an 2020, a conclu le ministre de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts

L’appui annoncé par l’UE à «Génération Green» pourrait avoir un effet accélérateur pour l’atteinte des objectifs escomptés.