Inde: Le patron de la Banque centrale attaque les USA

Le gouverneur de la Banque centrale de l’Inde attaque les États-Unis et d’autres pays industrialisés pour leurs politiques économiques égoïstes qui consistent à relancer leurs économies au détriment des marchés émergents.

Dans un discours prononcé un jour après la décision de la Réserve fédérale de réduire ses injections mensuelles de liquidités dans les marchés qui avaient alimenté d’énormes flux de capitaux vers les pays en développement, Raghuram Rajan a déclaré que les marchés émergents ont contribué à sortir le monde de la crise financière de 2008 et ne devraient pas être ignorés aujourd’hui de cette manière.

L’Inde, la Turquie et l’Afrique du Sud viennent tous de relever les taux d’intérêt. C’était en partie pour arrêter les fortes dévaluations qui alimentent l’inflation. En même temps, les investisseurs ont désormais tendance à retirer massivement leurs fonds de ces pays et les placer dans les pays développés dont notamment les États-Unis qui ont enregistré le 30 janvier une croissance annualisée de 3,2% au dernier trimestre de 2014.

« La coopération monétaire internationale a été démantelée », a déclaré M. Rajan, ancien économiste en chef du Fonds monétaire international, dans une interview télévisée sur Bloomberg India, deux jours après le relèvement par la Reserve Bank of India de son principal taux d’intérêt de 25 points de base pour s’établir à 8%.

« Les pays industrialisés ont un rôle à jouer dans la restauration de cette coopération. Ils ne peuvent pas s’en laver les mains en disant ‘nous, on fait ce qu’on a besoin de faire, les marchés vont s’ajuster et vous, débrouillez-vous’ ». Mr. Rajan constate aussi le « dysfonctionnement » du G20, si prompt pourtant à organiser des sommets lorsque la crise concernait les pays développés en 2009 et 2010. Le Congrès américain a récemment refusé de ratifier une augmentation des quotas prévue de longue date pour le Fonds monétaire international qui serait favorable aux marchés émergents. Et au cours de la semaine dernière, la Fed a ralenti ses achats d’actifs sans mentionner la volatilité des marchés émergents.

M. Rajan a déclaré que l’élaboration des politiques devrait être mieux coordonnée, comme elle l’a été lors de la crise lorsque les émergents ont aidé les pays industrialisés à faire face à leurs économies vacillantes.

« Les émergents ont essayé de soutenir la croissance mondiale par d’énormes mesures de relance budgétaire et monétaire », a-t-il souligné. Si les pays industrialisés insistent pour que les pays en développement fassent cavaliers seuls, alors il se peut qu’ils « n’aiment pas le genre d’ajustements que nous serons obligés de faire… Nous avons besoin d’une meilleure coopération, mais malheureusement ce n’est toujours pas le cas ». Jahangir Aziz, chef économiste Asie pour JPMorgan, a déclaré: qu’il exprime la préoccupation de tous les banquiers centraux des Cinq Fragiles qui diront : « Nous étions là quand vous aviez besoin des émergents pour fournir un soutien budgétaire et monétaire afin d’éviter l’effondrement de l’économie mondiale. Aujourd’hui, vous inversez les politiques sans même impliquer le G20. » La plupart des analystes estiment que le sell-off des devises dans les marchés émergents a été déclenché principalement par des problèmes spécifiques à chaque pays et par les craintes d un ralentissement en Chine.