MALI LA VOIE ROYALE

La tournée africaine du Roi s’inscrit dans une continuité. Celle d’une politique basée sur la coopération Sud-Sud, couvrant tous les domaines. Quand il a quitté l’OUA, le Maroc n’a gardé que quelques pays amis et s’est un peu détaché du contin

ent africain. C’était plus par dépit que par conviction, puisque Hassan II, lui-même, rappelait à chaque occasion que si le Maroc était méditerranéen, ses racines sont africaines. Depuis son intronisation, Mohamed VI a totalement changé d’optique. Patiemment, la diplomatie marocaine a réussi le tour de force de devenir incontournable. Depuis 2005, elle développe le concept de la coopération Sud-

Sud. Dans tous les pays où existe une gouvernance normale, le Maroc est présent, en soutien aux réformes. Sur le plan économique, le Royaume s’est installé en hub pour l’Afrique. Le système bancaire, les télécoms, le BTP, les grands groupes marocains sont omni-présents en Afrique. La nouvelle étape, c’est de drainer des investissements étrangers et de les accompagner sur le continent, qui offre le potentiel de croissance le plus important au monde. Mais le Maroc ne se limite pas à cela. Il y a une vraie offre structurée, de soutien aux réformes démocratiques, de lutte contre l’extrémisme religieux et d’aide au développement. C’est au Mali que cette pensée

globale s’est le mieux exprimée. BarackObama et François Hollande ont écrit « au Mali, les forces françaises et celles del’Union Africaines bénéficiant de l’aide des USA en matière de logistique et de renseignement, ont fait reculer les insurgés liés à Al Qaida, ouvrant ainsi au peuple malien une voie démocratique ». Le Maroc a joué un rôle central dans tout ce processus. Un sécuritaire italien a déclaré que Rabat avait attiré l’attention sur le risque Al Qaida avant tout le monde. Malheureusement, l’Algérie a toujours refusé de collaborer avec le Maroc sur le Sahel. Au-delà du renseignement, le Maroc a, dès le début des opérations, installé un hôpital militaire mobile pour répondre aux situations d’urgence. Une aide substantielle a été accordée aux humanitaires. Le Roi a tenu à assister à l’installation du nouveau président, signifiant le soutien à la démocratisation. Ensuite, le Maroc a pris en charge la formation du 500 Imams, parce qu’il faut savoir que c’est souvent l’ignorance qui aide l’extrémisme à proliférer. Enfin, parce qu’il y a un vrai problème avec les touaregs, qui ont passé des alliances conjoncturelles avec Al Qaida, sans partager son idéologie, le Maroc est intervenu. Il a réussi à convaincre le

EN SEPTEMBRE 2013, UNE CONVENTION A ÉTÉ SIGNÉE DEVANT LES DEUX CHEFS D’ETAT POUR LA FORMATION DES IMAMS MALIENS. DEPUIS, 500 IMAMS ONT ÉTÉ FORMÉS.

Mouvement National de Liberation de l"Azawad de s’inscrire dans la transition démocratique, dans le respect de l’intégrité territoriale du Mali. En clair, cela veut dire négocier pour abandonner à la fois la lutte armée et le séparatisme. C’est un pas énorme, parce que ce conflit date de 30 ans, alimenté par l’Algérie et le régime de Kadhafi.

Discret mais efficace

 

Au Mali, le Maroc a développé son offre globale de manière magistrale. L’institution monarchique a des liens ancestraux avec l’Islam subsaharien. Il y a une véritable connaissance des sociétés africaines. Dans les discussions, mais surtout dans l’action, Rabat a prôné une guerre utile. Il ne s’agissait pas seulement de réduire les insurgés liés à Al Qaida, mais comme disent Obama et Hollande, « d’offrir au peuple malien une voie démocratique ». Rabat, défend l’idée que la démocratisation est indissociable du développement. Par ailleurs, la mise à niveau du champ religieux dans ces pays est fondamentale et le Maroc, qui a historiquement introduit l’Islam dans ces contrées, assume ses responsabilités, le Roi en tête, puisqu’il est « Amir Al Mouminine ». Cette approche marocaine a, apparemment, convaincu les diplomates occidentaux. Ils plaident, tous, pour une vision qui ne se limite pas au sécuritaire. Malgré les contraintes budgétaires des pays concernés, il y a une forte pression en faveur du co-développement. Il n’y a qu’une seule capitale qui n’est pas contente : Alger. Lors d’un sommet des parlementaires islamiques à Téhéran, les représentants algériens ont proposé un texte saluant « l’intervention déterminante de l’Algérie dans la question malienne ». Alger a contesté l’intervention française, n’a pas envoyé un dinar aux populations en détresse, c’est cela la réalité. Le pouvoir algérien, le président impotent, accepte très mal la percée marocaine au Mali. Il se trouve que nombre de pays africains adhèrent à la vision du Maroc pour le continent, et cela n’est pas conjoncturel ❚

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