Faut-il bannir la différence ?
La danseuse Noor.

Pour qu’une société soit réellement démocratique, il faut qu’elle intègre tous les citoyens, dans un esprit d’égalité, dans le champ public en préservant leur dignité dans le champ privé. Les minorités, qu’elles soient politiques, religieuses, sexuelles, ethniques, doivent avoir des droits renforcés. Mieux, ceux-ci doivent être protégés tant qu’ils ne mettent pas en danger l’édifice social.

Il se trouve justement que le Maroc, comme tous les pays de la planète, est confronté à des problèmes liés aux minorités. Jusqu’à présent, nous avons plaidé en faveur de la protection des droits des minorités religieuses et politiques. Cela ne suffit pas. Le débat sur les minorités sexuelles doit être ouvert aussi.

La science permet aujourd’hui d’établir clairement ces deux constats. Le premier concerne la prétendue normalité sexuelle que l’on assimile à tort à l’hétérosexualité. Depuis bien longtemps, cette «théorie» a été battue en brèche. L’homosexualité a existé de tout temps, sans que l’on puisse déterminer s’il s’agit bien d’un phénomène relevant de l’inné ou de l’acquis.

Par ailleurs, il est prouvé que l’homosexualité a existé dans toutes les civilisations depuis des millénaires. Pourtant, ce n’est qu’au courant des années 70 du siècle dernier que l’OMS a retiré l’homosexualité des maladies mentales.

Le second constat concerne les «accidents » de la nature. Des hommes dans des corps de femmes ou l’inverse. Pendant longtemps reniée, l’existence de ce genre humain a été scientifiquement prouvée. Elle est aujourd’hui une vérité indiscutable.

Il n’empêche, les hermaphrodites, qui représentent 1% de la population dans certains pays, sont toujours mis au ban de la société. Alors que nous sommes en plein débat sur la construction démocratique, il nous faut poser la véritable question : qu’est-ce qu’on fait de ces minorités ?

L’Islam, comme toutes les religions, lie la sexualité à la procréation et estampille donc la normalité sexuelle comme étant l’hétérosexualité devant être vécue dans le cadre de la famille. Cela a induit un conservatisme social, qui s’accompagne d’une certaine hypocrisie. En revanche, aux yeux des scientifiques, l’homosexualité n’est plus abordée sous le prisme des pathologies. Il s’agit plutôt pour eux de comportements humains qui ont existé, qui existent et qui existeront jusqu’à la fin des temps. C’est ce constat scientifique qui a poussé des démocrates, partout où ils ont pu s’exprimer, à en appeler à l’adoption de quelques lois capitales permettant aux concernés(es) de vivre leur différence tout en étant entièrement intégrés dans la société.

Les personnes ayant certaines spécificités physiques singulières se trouvent dans une situation encore plus particulière. En tout cas, on ne peut plus tolérer aujourd’hui que l’on condamne à une non-vie le nouveau-né que l’on prend pour un garçon, alors qu’il est fondamentalement et organiquement une fille. Toutes les sociétés qui se respectent ont pris conscience de cette problématique et ont légiféré pour la régler. Au Maroc, ce débat n’est même pas encore ouvert. Il faut alors qu’il le soit. Parce que nous ne pouvons pas construire une société démocratique en excluant nos minorités.

Autres du dossier 

. Hermaphrodisme : une anomalie congénitale très rare

. Les féministes s’en mêlent

. Entretien avec la danseuse Noor сип панель в приморье