Maroc-Tunisie : Mutations Stratégiques

L'Afrique, la zone MENA connaissent de véritables séismes, qui changent la manière d'appréhender ces régions. L'exemple le plus récent, c'est celui de la visite du Roi Mohammed VI en Tunisie. Il a été accueilli par la Chambre constituante pourtant dominée par les Islamistes. Les discours n'étaient pas de convenance. L'expérience marocaine en matière de justice transitionnelle est citée en modèle, et les forces politiques les plus représentatives veulent s'en inspirer en Tunisie. Le discours du Roi du Maroc a réaffirmé trois principes. D'abord que les peuples arabes ont exprimé leur volonté d'en finir avec l'absolutisme. Ensuite que les questions de développement sont au centre de tout projet futur et enfin que l'intégration régionale n'est ni un choix facultatif, ni un luxe idéologique, mais une nécessité économique. Depuis plus de dix ans, la diplomatie Royale a développé une vraie stratégie s'appuyant sur un triptyque. D'abord le soutien aux mouvements démocratiques et aux transitions. Le Maroc a choisi le camp des peuples, contre les dictateurs alors que beaucoup d'observateurs pensaient qu'il serait dans l'oeil du cyclone. Ensuite le Maroc a choisi la coopération sudsud, en appelant à sortir des vieux schémas de l'assistanat. Le continent africain a le meilleur potentiel de croissance du monde. Enfin, le Maroc, totalement investi dans la lutte contre le terrorisme, propose une stratégie multidimensionnelle, un vrai package. Celuici comporte une dimension sécuritaire, économique, politique par le soutien aux processus démocratiques, mais aussi religieux en revitalisant les circuits de l'Islam tolérant.

La Vision Royale pour l’Afrique

Le Roi du Maroc, lors de sa dernière visite africaine, dans son discours d'Abidjan a déclaré : « Il n'y a pas de chasse gardée ». Malgré les limites de son économie, le Royaume a réussi à développer un véritable courant d'affaires avec l'Afrique. Il est politiquement omniprésent sans être membre de l'Union Africaine. En outre, l'Islam sub-saharien a des attaches pérennes avec la commanderie des croyants. Nous sommes face à des dynamiques très différentes. Au delà des pays instables, l'Afrique présente des processus de démocratisation, de meilleure gouvernance et d'affirmation des Etats. Le Maroc a patiemment construit une approche qui tient compte de ces évolutions et propose une perspective. Rabat a une armée solide, une économie fiable, mais des ressources encore limitées. Ce que la vision marocaine propose, c'est juste le traitement des africains en adultes, en s'inscrivant dans le processus en cours. La visite du roi Mohammed VI en Tunisie est symbolique. Il a été reçu par la constituante du premier pays qui a connu une révolution dans le cadre de ce que l'on a appelé le printemps arabe, et cité en modèle de démocratisation. Mais le plus important c'est qu'il est évident que le non-Maghreb coûte cher aux peuples et que l'attitude d'obstruction algérienne est ridicule, pour ne pas dire carrément criminelle vis à vis des peuples de la région. La zone MENA, l'Afrique subsaharienne, voilà des terrains ou le Maroc est présent avec une vision novatrice. Paris et Washington ont tout à gagner en s'inscrivant dans cette logique et cet élan. Sinon, la Chine, la Turquie et d'autres pays qui ont déjà pris un avantage certain pourraient influer sur les rapports géopolitiquews futurs ❚