Bonus Bancaires : Bras de fer entre Bruxelles et la City

Un haut fonctionnaire de l’UE a averti la City que Bruxelles était prête à contester l’utilisation des défraiements (cash allowances) qui fleurissent sur les fiches de paie des banquiers, prétendument conçus pour contourner le plafonnement des bonus prévus par les règles de l’UE. Michel Barnier, le commissaire européen chargé des services financiers, a vivement critiqué le contournement apparent des restrictions relatives à la rémunération des banquiers par les banques de la City. « Je voudrais souligner mon inquiétude profonde concernant ces pratiques de contournement », explique le dirigeant français dans une lettre adressée à l’Agence bancaire européenne (ABE) dans laquelle il lui a rappelé la nécessité de traiter les pratiques de la City qui reviennent à « ignorer l’esprit - sinon la lettre - de la loi européenne ». Londres est le foyer de la majorité des banquiers européens à revenus élevés. Et l’Autorité de réglementation prudentielle britannique (PRA) est responsable de l’application du plafonnement des bonus à partir de l’année prochaine, même si le Royaume-Uni reste déterminé à combattre toute idée de plafonnement tout en affirmant qu’il s’agit d’une procédure injustifiable et erronée. Après avoir été mis en minorité à Bruxelles l’an dernier, le chancelier George Osborne a ordonné des poursuites judiciaires contre les plafonnements des bonus, qui, selon lui nuiraient à la stabilité financière en créant des «incitations perverses» pour gonfler les salaires fixes. L’affaire devait être entendue au cours de la semaine à Luxembourg. La PRA considère ces défraiements « allowances » comme des rémunérations fixes. Et a approuvé leur introduction dans nombre de banques dont notamment Barclays, Goldman Sachs et HSBC. Contrairement aux salaires, ils peuvent évoluer d’une année sur l’autre et n’ouvrent pas droit à pension. Mais certains responsables européens estiment que ces allocations sont à tort considérées comme une rémunération fixe parce qu’elles sont payées de manière sélective aux cadres supérieurs. Elles sont limitées en durée et peuvent parfois être annulées. L’ABE contrôle la mise en oeuvre des lois bancaires européennes. Et elle est en train d’élaborer des lignes directrices qui doivent permettre de définir exactement ce qui relève de la rémunération fixe et ce qui relève du variable. Bien que les lignes directrices de l’ABE soient non contraignantes, les autorités nationales seront amenées à s’expliquer sur leur non-conformité. Et l’ABE pourra, en dernier recours, ordonner aux banques de cesser certaines pratiques. Barnier a demandé à l’ABE de partager les résultats d’une enquête menée sur les pratiques de rémunération d’ici la fin septembre. « Pour que nous puissions répondre aux préoccupations en temps opportun par une réponse politique coordonnée », insiste-t-il. Réponse du Trésor : « La Grande- Bretagne a assumé un rôle de leader mondial dans la lutte contre les pratiques inacceptables de rémunération dans le secteur bancaire. C’est la raison pour laquelle nous nous opposons à ce plafonnement des bonus à l’échelle européenne dont on a précipité l’adoption sans une évaluation adéquate de l’impact et qui pourrait nuire à la stabilité financière donnant lieu à une augmentation des coûts fixes dans les banques »