High-Tech : La Silicon Valley face à la méfiance européenne

Selon des investisseurs et dirigeants de premier plan de la Silicon Valley, le secteur de la haute technologie US n’a pas réussi à évaluer les préoccupations mondiales croissantes sur les questions liées à la vie privée et à la sécurité en ligne. Ce secteur devrait donc agir d’urgence pour éviter de ternir davantage son image. Cette auto-critique, en grande partie adressée aux groupes de l’internet grand public dont notamment Google et Facebook, survient à l’heure où certains des plus grands noms du secteur ont été malmenés par les conséquences des révélations répandues sur la surveillance US des utilisateurs sur internet, et des inquiétudes quant à leur dominance culturelle. Selon Peter Thiel, investisseur start-up et directeur chez Facebook : « La Silicon Valley est tout à fait inconsciente de la mesure dans laquelle ces inquiétudes montent crescendo en Europe. C’est une chose extrêmement importante que la Silicon Valley sous-estime ». Google a été au centre du litige. La Commission Européenne a exercé davantage de pression dans une affaire de concurrence la semaine dernière. Elle a également imposé un « droit à l’oubli » numérique. Une décision judiciaire l’obligeant à retirer des liens de ses services de recherche européens. « J’ai été surpris par ce changement aussi rapide », s’exclame Eric Schmidt, président de Google, se référant au changement de l’humeur politique envers la technologie US. Cependant, il a nié que la Silicon Valley n’a pas réussi à anticiper ces problèmes. « Il est facile de blâmer le secteur du high-tech de ne pas être suffisamment sensible. Nous sommes tout à fait sensibles à ces questions. Croyez-moi ». Thiel admet que Facebook devait se concentrer sur son approche européenne. « Nous ne pensons certainement pas qu’il y ait une approche unique. Facebook voudrait être plus sensible aux préoccupations locales ». Marc Benioff, PDG de Salesforce.com, l’un des plus gros vendeurs de services online B2B, soutient que ces sociétés High-tech avaient payé très cher pour avoir imposé une vision de leur technologie centrée sur les USA. Jim Breyer, l’un des premiers investisseurs et ancien membre du conseil d’administration de Facebook, a déclaré que le gouvernement et le secteur de la high-tech US devaient « intensifier sensiblement leurs efforts s’ils veulent regagner la confiance du monde ». Le déluge des réactions négatives provoqué par les questions de la confidentialité et de la sécurité a commencé à se propager à travers la Silicon Valley, où certaines jeunes entreprises se sont ruées vers de nouvelles technologies sans faire de ces questions une priorité absolue. En effet, ces tensions ont engendré des conflits à l’intérieur de l’industrie. Alors que des entreprises comme Facebook et Google prétendent que leur business n’a été que légèrement touché, celles qui vendent les services du cloud computing devraient perdre entre 22 à 45 milliards de dollars au cours des trois prochaines années à cause des répercussions du scandale Snowden, selon la Fondation de la technologie de l’information et de l’innovation. « Certains acteurs dans notre industrie ont sous-estimé le degré auquel les gens peuvent se soucier de la confidentialité», a indiqué Brad Smith, conseiller juridique de Microsoft, qui cherche à recentrer son activité sur les services du cloud computing. Et de conclure : « Je ne suis pas sûr que les gens de la Silicon Valley soient conscients de tout cela »