Le grillage sculpté, par Alban Marissal

'Installé au Maroc depuis sept ans, Alban Marissal, est un photographe et sculpteur français  qui explore la matière depuis l’âge de 11 ans. Véritable adepte de l’art brut, cet autodidacte originaire de Roubaix, crée de façon viscérale et met à nu son univers intérieur, pour répondre à son exigence du mouvement, de la légèreté et son désir de transcender la matière. Pour cela, il choisit de dompter la maille de fer, un métal froid et rigide qu’il modèle à la main et à qui il donne une âme pour dévoiler la lumière de l’esprit et libérer ainsi le corps physique qu’il considère comme une "prison pour l'âme". Ses personnages en grillage, d’une rare finesse, invitent à la découverte de l’art comme moyen d’expression au service des sens et de la beauté. Une manière pour lui de symboliser la notion de frontière, entre le corps et l’esprit, la physique et le métaphysique, le visible et l’invisible. Ses silhouettes en maille de fer ou encore ses visages en inox (expo « Faces », visages à Marrakech mi-octobre) suscitent la curiosité et l’étonnement, et nous rapprochent de personnages qu’on croit reconnaitre. En offrant un regard poétique sur le Monde, ils s’insèrent dans les décors les plus improbables, et soufflent dans les esprits une brise de création folle pour un instant d’évasion.'

 

L’Observateur du Maroc : Pourquoi le choix du grillage ?

ALBAN MARISSAL : C’est un choix de coeur, c’est un matériau qui me permet de répondre au mouvement que j’attends de la matière, c’est une matière brute à la base et qui n’a pas de valeur. Elle est crée normalement pour établir la frontière, créer des barrières, ça symbolise pour moi le corps physique qui est l’esprit pour l’âme. L’esprit justement qui est une frontière entre le visible et l’invisible, le conscient et l’inconscient. C’est une matière que j’aime transcender, parce qu’elle est dure, même si dans sa symbolique, le grillage n’est ni sensuel, ni sec, ni velouté. J’aime cette idée de transparence dans le volume que permet le grillage. De plus, c’est une matière qui a peu de contraintes techniques et que j’arrive à dompter.

Pourquoi sculptez-vous toujours des formes humaines ?

Ce sont des formes humaines qui sont dans le mouvement. On n’est pas dans la figuration mais plutôt dans la symbolique. Toutes les couleurs sont possibles, et une fois la structure formée, je peins le grillage. Ce sont des bustes, des danseurs, des couples en danse, c’est l’union de la dualité pour moi, c’est l’union des deux éléments homme femme, audelà des corps physiques, c’est une danse, c’est du mouvement, donc c’est un travail d’union entre l’élément masculin et féminin, comme une dualité alchimique.

Vos oeuvres sont sensuelles et s’insèrent dans tous les décors ?

Oui, j’essaie d’augmenter la magie du lieu, j’utilise l’espace et j’essaye de l’habiter, de sorte à amener un peu de poésie, dans des lieux qui peuvent des fois être rigides.

Les sculpteurs qui vous inspirent ?

Incontestablement Cocteau et Alberto Giacometti.

Votre prochaine exposition Faces, ( Visages ), est en inox, de quoi s’agit-il d’abord et pourquoi ce choix ?

C’est une collection de visages orientée pour habiller les jardins de la ville ocre (jardins de la palmeraie…), ce sont des pièces de 90 cm, destinées à faire 2m30 ou 3m. Puis, j’aimerais que mes sculptures s’exportent à l’étranger, sans moi. Le grillage nécessite ma présence pour installer la pièce, il faut respecter la position du personnage. Ce sont un peu comme des marionnettes, pas maniables, pas déformables, mais c’est délicat de faire voyager ces pièces à New York, au Japon, …

Pourquoi des visages ?

À la base, c’est un travail de dessin. Les sculptures en grillage, je ne les dessine pas avant. Ça vient avec la matière. Par contre, la collection d’inox, c’est une collection dessinée puis après, travaillée avec des artisans. Ensuite, ce sont des lignes, c’est un travail de transparence assez fin, avec un côté abstrait, parce qu’on ne voit pas le visage à la première vue. Le visage réunit les sens du corps, le goût, la vue, l’ouie, l’odorat, … C’est dans le regard par exemple, que l’on perçoit le caractère d’une personne, donc, au niveau sensibilité, un visage exprime quelque chose au-delà du corps, il est dans l’entité et l’esprit de la personne ❚

 

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