Les Igoudars candidats au patrimoine mondial de l’Unesco
Chaque famille de la tribu a sa cellule dans l'Agadir pour y conserver ses biens

Précieux héritage de la culture amazigh, les Igoudars font l’objet d’un projet d’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Fier du précieux héritage de ses ancêtres amazighs, le Maroc veut inscrire ses Igoudars sur la prestigieuse liste du matrimoine mondial de l’UNESCO. Samedi dernier, à Agadir, le ministère de la culture a tenu un atelier national pour le lancement du projet d'inscription des Greniers collectifs (igoudar) au patrimoine mondial.

Génie amazigh

Patrimoine culturel matériel et immatériel d’une grande valeur, les greniers collectifs sont des constructions fortifiées dans lesquelles les tribus amazighs emmagasinaient les récoltes et les biens de valeur tel l’argent, les bijoux, les armes, et les actes adoulaires. « En temps de conflits, habitants et bétail s’abritaient dans ces greniers convertis en site refuge. Mais en plus du rôle économique, ces édifices ont eu un rôle sociopolitique indéniable, servant aussi de lieu d’assemblée des notables pour discuter de la gestion des affaires communautaires », explique le dossier de candidature élaboré par le ministère.

« Après Khettarate, cet atelier confirme l'orientation stratégique du ministère de diversifier les inscriptions dans le cadre de la régionalisation et de la valorisation du patrimoine amazigh », annonce Othman El Ferdaous, ministre de la culture. D’après ce dernier, le choix d'inscrire ces sites a été dicté par leur rôle primordial dans la cohésion sociale et dans la construction de solidarités utiles en temps de crise : Sécheresses, famines, épidémies ou autres attaques de criquets.

« La dimension immatérielle de la gestion des greniers collectifs consignée dans le droit coutumier (azerf), les chartes collectives (ilouh), la gestion de la sacralité de l’espace, la présence des jarres à dons destinées à la collecte en vue d'une redistribution communautaire... tout ça fait des igoudars un témoignage fort du génie et de la créativité humaine face aux contraintes notamment écologiques », argumente le responsable.

554 Igoudars

Souvent perchées sur des sommets inaccessibles, les igoudars se composent de cellules ouvrant sur une place ou un couloir à ciel ouvert. Chacune de ces cellules assez étroites appartient à une famille, l’ensemble étant géré collectivement et entretenu aux frais de la communauté. « Il s’agit en somme d’un modèle social et architectural de montagne caractéristique de la culture amazighe », ajoutent les auteurs du dossier de candidature. Même s’ils étaient spécialement bien conservés dans notre pays, les Iguidars ne sont toutefois pas une exclusivité marocaine. Leur domaine s’étend en effet de l’Égypte aux Îles Canaris. Mais c’est au Maroc qu’ils ont perduré.

La Direction du Patrimoine Culturel a recensé 554 édifices sur l’ensemble du territoire national. Ils se concentrent majoritairement dans les étendues de l’Atlas et des vallées présahariennes du Maroc, à savoir l’Anti-Atlas, le Haut Atlas, le massif de Sirwa et la région d’El Faija. Les tribus de certaines régions du Moyen Atlas possèdent des greniers dans l’enceinte de leur maison. Les greniers sont répartis sur une aire géographique vaste de l’Afrique du Nord allant de Tripoli jusqu’à l’Atlantique sous différents vocables : à Jbel Naffusa (qsar ou temldelt), en Tunisie méridionale (ghurfa), aux Aurès en Algérie (gela ou kalaa), au Rif (ajdir), au Souss et au Haut Atlas occidental (agadir), au Haut Atlas central (ahanou,et ighrem) au Moyen Atlas et au Haut Atlas méridional (ighrem).

« Cela fait de ces établissements des éléments identitaires saillants de notre pays et un des marqueurs forts de son histoire traduisant le mode de vie collectif, dans une société agricole. À ce titre, ils méritent une attention particulière pour les protéger et les promouvoir davantage afin de les ériger en patrimoine universel reconnu par l’UNESCO », soutient le département de la culture en insistant sur l’importance de valoriser la diversité culturelle du Maroc.