L’autre visage de l’immigration Subsaharienne au Maroc

Quartier d’affaire de Casablanca, 12h30. Un groupe de jeunes cadres s’apprête à traverser le bruyant boulevard Zerktouni, tout droit vers les Twin Center. Parmi eux, un homme, plutôt jeune, en costume, élégant et impeccable, le visage rieur. Sa peau est plus foncée que les autres, il est d’origine subsaharienne. Ces scènes de vie sont devenues communes dans la capitale économique. En effet, nombreux sont ceux qui profitent du dynamisme et de la croissance rapide du pays pour venir s’y établir. Cadres, entrepreneurs, artistes, jeunes et moins jeunes ont trouvé au Maroc un cadre de vie, mêlant à la fois ascension professionnelle et proximité culturelle. Ils représentent l’autre visage de l’immigration subsaharienne au Maroc. Racisme, exclusion, violence ne font pas partie de leur jargon. Ici on parle intégration, mixité, échange et opportunités. C’est l’aspect trop souvent oublié des migrations d’origine subsaharienne. Une immigration qualitative, d’individus motivés et investis. Celle qui souhaite combattre les préjugés et s’intégrer dans une société marocaine moderne, à la fois multiculturelle et multilingue. Les accords de coopération entre le Maroc et l’Afrique, surtout en matière d’éducation, ont boosté les flux de l’immigration subsaharienne. Le Maroc est devenu la nouvelle référence, laissant loin derrière la France jusqu’ici très prisée par les élites africaines. Les raisons de ce succès ? Des études avec un excellent rapport qualité/prix, dans un environnement culturel et géographique proche du pays d’origine. Autre atout considérable, les réelles opportunités économiques qui se présentent à la fin des études, face à une Europe morose et une Afrique subsaharienne qui tente, tant bien que mal, d’intégrer les jeunes dans son tissu économique. Résultat, les diplômés reculent l’échéance de retour au pays, jusqu’à se projeter de façon indéterminée dans le Royaume. Le Maroc représente bel et bien un hub pour le continent africain, une plateforme en mouvement pour les affaires et les études. Les immigrés subsahariens l’ont bien compris et surfent sur cette vague de croissance. À elle seule, Casablanca rassemble tout le nec plus ultra des multinationales marocaines et étrangères, friandes des bons profils en provenance d’Afrique de l’ouest. Surtout que les investisseurs s’accordent à considérer le continent comme le nouvel eldorado. Une nouvelle tendance vient enrichir, depuis quelques années, le tissu de l’immigration subsaharienne, celle de l’arrivée massive de jeunes entrepreneurs qui décident de lancer leur business depuis le Maroc. C’est le cas de la startup ivoirienne Abidjan.net, un portail de recherches et d’informations, qui a établi sa base dans le royaume. Proximité avec l’Europe, environnement économique stable, facilité d’investissement, accointance culturelle, sont autant d’avantages qui jouent en la faveur du pays. Un vrai appel d’air. Cette tendance se confirme sur le site de recrutement marocain ReKrute.com qui enregistre de plus en plus de CV d’individus d’origine subsaharienne. Le Maroc évolue et les habitudes des migrants avec. Un certain communautarisme qui prévalait ces dernières années dans les milieux d’immigrés subsahariens a laissé place à davantage de mixité. Les grandes villes sont devenues de véritables lieux de melting-pot et de rencontres. Des nights clubs de Marrakech aux bistrots chics de Casablanca, les migrants investissent des espaces dans lesquels ils étaient auparavant absents, délaissant pour beaucoup les lieux de sortie communautaire. Ils occupent une place nouvelle dans le paysage urbain et branché des villes marocaines. Ils sont mobiles et voyagent à travers le Maroc, curieux et ouvert sur la société qui les entoure. Beaucoup apprennent la darija et cultivent pour le pays un vrai sentiment d’appartenance. Alors, à l’heure où le Maroc se projette sur le continent africain, l’existence d’une immigration subsaharienne qualitative, intégrée et dynamique dans le Royaume, prouve bien que la réalité à supplanter les efforts diplomatiques. La capacité d’intégration des immigrés dans le tissu économique et social du pays renforce l’image d’une société marocaine à la fois multiforme et pleine de vitalité ❚