Maroc-France, Le poids de l’Histoire
Ahmed CHARAI

Mustapha Ramid et Madame Taubira ont réactivé des accords judiciaires entre le Maroc et la France, suspendus après la multiplication d’actes considérés comme touchant à la souveraineté marocaine.

C’est le début d’un dégel bienvenu, mais le débat reste entier. Le discours royal à Abidjan en avait fixé les contenus, l’ex-puissance colonisatrice devrait accepter des rapports sortant du paternalisme, entre Etats égaux, partenaires et non pas subordonnés. La crise qui est en phase finale n’est pas une saute d’humeur, elle est symptomatique d’un nouvel ordre, d’une nouvelle réorganisation des relations internationales.

Manuel Valls, le Premier ministre français a rappelé, à plusieurs reprises, le rôle du Maroc en tant qu’allié dans la lutte contre le terrorisme, mais aussi en tant que pays ami, tout court. La Maroc se devait de réagir, d’affirmer son existence en tant qu’Etat indépendant, pétri d’histoire selon la formule du Marechal Lyautey, énoncée face à la représentation française, il y a plus d’un siècle. Le refus d’un comportement cavalier de la France était légitime, nécessaire, et a été bien mené.

Mais il ne faut pas en faire un casus belli. Les relations entre le Maroc et la France, sont d’abord imprégnées par l’histoire, mais aussi par les réalités sociales. Ce ne sont pas les 44 années du protectorat français qui ont façonné ces relations, bien qu’elles soient importantes. Nos liens sont beaucoup plus anciens. Pour rester dans le contemporain, rappelons que des milliers de Marocains ont perdu la vie en défense de la liberté du peuple français.

Humainement, il y a près de deux millions de français qui continuent à se sentir Marocains. De la même manière, les Français vivant au Maroc se sentent chez eux. Sur le plan économique, la France reste le premier partenaire du Maroc.

Là aussi, les règles ont changé. Il n’y a plus de chasse gardée, mais un environnement ouvert à la concurrence où les entreprises françaises ont un atout, celui de la proximité, de la connaissance du terrain. La langue française, la francophonie des élites marocaines, la francophilie sont des atouts historiques.

Il est donc clair que le Maroc et la France ne peuvent se brouiller longtemps, sans tourner le dos à l’histoire. Le dégel entamé est dans la nature des choses. S’il est fondé sur un partenariat d’égal à égal, il ne pourra que perfectionner les relations bilatérales et les mettre au niveau du poids de l’histoire commune.