Retour vers l’affrontement
Ahmed Charau00ef

Ce qui s’est passé en Allemagne, lors de la grand-messe annuelle sur la sécurité a probablement une portée historique : la fin de la guerre froide n’est plus qu’un évanescent souvenir. Le monde y retourne avec une vitesse et une violence hallucinantes. Les Américains accusent le système Poutine « d’actes barbares », Lavrov, le diplomate en chef russe, déclare que les « USA veulent dominer l’Europe ». à la base de ces passes d’armes, il y a plusieurs conflits. L’Iran, la Syrie, mais surtout l’Ukraine. Sur ce dernier dossier, Européens et Américains ne sont pas sur la même longueur d’ondes. Alors que l’administration Obama menace d’envoyer des armes à l’Ukraine, la France et l’Allemagne ne veulent pas en entendre parler. La chancelière allemande est même allée jusqu’à déclarer que l’armée ukrainienne n’a aucune chance d’impressionner « l’armée rouge ». Le non-dit, c’est que la Russie avait obtenu lors du démantèlement de l’Union Soviétique des assurances sur son environnement, son espace vital : pas d’adhésion des nouveaux états libres à l’Union Européenne, ni à l’OTAN. Ces accords ont été passés entre les services secrets, puis au niveau des chefs d’états, pour encourager Gorbatchev et Eltsine à démanteler l’URSS.

François Hollande a déclaré que « l’Ukraine n’a pas vocation à rejoindre l’Union Européenne, ni l’OTAN ». Une manière de rassurer Poutine. Serait-ce suffisant ? On le verra dans les prochains jours.

Depuis la chute du mur de Berlin, on a vu défiler beaucoup de théories sur le multipolarisme. C’est Moscou qui a évité jusqu’ici la chute d’Assad, avec les conséquences dramatiques que l’on sait. Sans le soutien de Poutine, l’Iran aurait cédé devant les sanctions économiques.

La nouveauté, c’est que le couple franco-allemand rechigne à se mettre au niveau des USA. Paris et Berlin ne veulent pas de la continuation d’une guerre à leurs frontières. En grosses difficultés économiques, le couple franco-allemand a des intérêts à défendre qui dépassent largement ceux des Américains dans la région, leur économie étant plus dépendante de la région du pacifique.

Ceux qui pensent pouvoir éviter une nouvelle guerre froide paraissent irréalistes. Les acteurs en présence sont trop « typés » pour accepter des accords viables. Le système Poutine est basé sur l’idée, hyper nationaliste, de « la grande Russie ». Il considère que son pays a été floué sur le Kosovo et plus récemment sur la Lybie, d’où l’usage massif du droit de veto dès que l’un de ses alliés est en question. Aux USA, le dogme veut que la démocratie a vaincu le communisme et qu’il n’y a pas de gants à mettre avec la Russie. C’est irréconciliable et cela refait de l’Europe un centre de tensions, une zone de conflits. Nous sommes donc face à une nouvelle phase historique qu’il faut appréhender intelligemment pour ne pas être en porte-à-faux.