Le PPS doit rester moderniste
Ahmed Charau00ef

D’abord le Parti du progrès et du socialisme (PPS) est l’héritier d’une tradition vieille de plus de 70 ans. Ensuite, cette formation politique, étiquetée parti de cadres, a joué un rôle prépondérant sur des questions essentielles comme le rôle de la femme, l’unité syndicale, la justice sociale et la démocratisation. Le PPS est aussi le premier parti de gauche à avoir théorisé dans un congrès, à travers la thèse de la révolution nationale démocratique, l’entente entre l’institution monarchique et l’opposition. Sur les questions sociétales, ce parti a toujours été à l’avant-garde. Saïd Saâdi a porté le Plan d’intégration de la femme, première tentative d’imposer des politiques publiques en faveur d’une marche vers l’égalité. Lâché en rase compagne, il a courageusement tenu tête, au mépris de sa carrière ministérielle. Le PPS a choisi de s’allier au PJD sur la base d’un programme gouvernemental, choix souverain qu’il ne s’agit pas ici de discuter. Cependant, est-ce que cette alliance signifie la perte d’identité du parti d’Ali Yata, Simon Levy, Layachi et d’autres figures emblématiques ? La question se pose parce qu’invariablement, face aux clivages sociétaux sur la femme, les libertés individuelles, l’actuel Secrétaire général du PPS botte en touche, en considérant qu’il refuse de se laisser «entraîner» dans des polémiques stériles sur des sujets mineurs. Nabil Ben Abdallah est un pur produit de l’histoire de ce Parti, dont il a dirigé l’organisation de jeunesse, la presse, avant d’en prendre la tête. C’est un homme de communication, qui était largement apprécié par les médias. Son attachement à la modernité n’est pas en cause. Seulement aujourd’hui, la question des libertés individuelles est au centre de vrais remous sociétaux, dans un affrontement où la neutralité n’a pas de place. Des courants de pensée agressifs tentent d’imposer leurs vues à l’ensemble de la société, y compris par la force. Des réactions citoyennes voient le jour pour refuser ce diktat, qui dans l’étape historique que nous vivons, celle de la montée de l’islamisme barbare, menace la stabilité du pays, fondée sur les équilibres progressifs, que le PPS lui-même avait théorisés. Encore une fois, il n’est pas question ici de discuter de l’opportunité des choix d’alliance du PPS. Cela appartient à ses militants. Mais établir une hiérarchie des priorités, en disant que combattre la corruption et agir pour la croissance relèguent les débats sociétaux à une position mineure, dénature le PPS. Que ce parti agisse dans la coalition gouvernementale pour réaliser les engagements électoraux est dans la nature des choses. Mais que le PPS déserte les combats sur les libertés individuelles et les acquis sociétaux en fait un parti hybride, parce qu’il aura abandonné son identité.