Congrès du PAM: Le changement dans la continuité
Ahmed Charau00ef

Le congrès du PAM s’est terminé avec l’élection d’Ilyas El Omari à la tête du parti et de Fatima-Zohra Mansouri à celle de son parlement, le Conseil national. Ces changements ne vont pas surprendre les observateurs. Depuis sa création, le PAM est le parti où il y a le plus de mobilité dans les organes de direction. A chaque congrès, les équipes dirigeantes voient arriver de nouveaux visages. Et cela se passe dans le respect de la démocratie interne, sans effusion, ni scission, contrairement aux autres partis, dont les congrès connaissent des contestations interminables. Le troisième congrès du PAM a mis Ilyas El Omari aux commandes. Il est l’une des chevilles ouvrières du parti depuis sa constitution. Son dynamisme et son bagout en font une personnalité hyper médiatisée. Fatima-Zohra Mansouri, l’ex-maire de Marrakech, est maintenant une femme politique aguerrie, au fait des arcanes de la vie politique. Le congrès du PAM a aussi été l’occasion de multiples clarifications. D’abord celle du positionnement. Ce parti déclare se situer au centre gauche, plaider pour une économie ouverte mais solidaire, défendre les libertés publiques et individuelles et s’attacher aux valeurs de l’islam. Sur ce dernier point, Ilyas El Omari, lui-même, a déclaré que «les Marocains se sont divisés sur la monarchie, sur la nation même, mais jamais dans l’histoire, sur l’islam. Personne ne peut prétendre à un monopole sur le sujet». Ces mutations du PAM s’inscrivent dans la marche vers la bipolarisation : le parti se veut le chef de file de l’opposition au PJD, à l’islamisme et l’alternative à la majorité actuelle. Il le fait sur le plan programmatique, mais aussi de manière pragmatique. Cette bipolarisation de la vie politique est diversement commentée. Les uns la considèrent comme une amorce d’une véritable recomposition du champ politique, les autres la jugent factice parce que, avancent-ils, d’autres sensibilités sont fortement présentes dans l’opinion publique. De manière objective, on constate que si elle n’est pas un fait avéré, elle est en marche. D’ailleurs, depuis 2011, le chef du gouvernement en a fait sa stratégie politique et électorale. Les autres partis, quelque soit le nombre de leurs élus, ne pèsent plus, comme avant, sur la vie politique que de manière limitée pour ne pas dire marginale. L’US FP et l’Istiqlal font les frais de cette marche vers la bipolarisation. Ces partis traditionnels, longtemps pivots de la lutte pour la démocratie, ou des gouvernements post-alternance, perdent pied face à cette situation, ce qui approfondit leurs dissensions internes. L’intérêt de la construction de la démocratie est que ces deux partis assument leurs responsabilités, rénovent leurs discours et leurs modes d’action pour constituer un troisième pôle attractif. Cette perspective ne peut qu’enrichir l’espace public et permettre un débat serein, clair sur les enjeux, et de haut niveau. Pour approfondir la démocratie, il faut que ce genre de débat s’impose et se substitue à la tentation, encore trop forte, de se limiter aux invectives, à la personnalisation des oppositions, au recours à la vie privée, ou au passé des adversaires. Pour intéresser nos jeunes, emporter l’adhésion aux institutions représentatives, c’est le chemin qu’il nous faut prendre. C’est la responsabilité de tous les partis.