Obama et l’Histoire
Ahmed Charau00ef

Depuis 1928, aucun Président des USA n’avait visité le voisin cubain. Le Président Obama l’a fait dans un contexte particulier. Il a d’abord mis fin à un conflit qui durait depuis 60 ans et qui était le plus emblématique de la guerre froide, puisque le monde n’a jamais été plus proche d’une guerre nucléaire que lors de la crise de la baie des colons. Il l’a fait à sa manière, progressivement, en s’attachant à la dimension humaine, puisqu’il a programmé une visite de trois jours, adressée davantage à la Nation cubaine qu’au régime. Mais ces pas sont définitifs, irréversibles. Les questions des droits de l’Homme ne peuvent pas être évacuées et Obama ne les évacue pas. Il continue à négocier, en rappelant que 60 ans d’embargo n’ont permis aucune avancée, tout en multipliant les difficultés quotidiennes du peuple cubain. En fait, le passage à l’acte d’Obama, souvent décrit comme décevant par rapport aux rêves esquissés lors de son élection, est réellement historique. Sur le plan interne, malgré les résistances de l’establishment, il a influé sur des politiques de santé, mais aussi d’éducation. Des actions solidaires, en rupture avec le principe de responsabilité personnelle, si prégnant dans la culture américaine. Sur le plan extérieur, il a hérité de la pire des situations. Celle d’une Amérique impériale, menant plusieurs guerres aux résultats néfastes, et n’ayant rien d’autre, à proposer, que l’envoi des Marines pour régler les conflits internationaux. Parce que ses convictions personnelles sont celles d’un homme de paix, mais aussi parce qu’il a compris que les USA seraient gagnants dans un monde multipolaire, ce qui est vrai, en prônant les compromis, plutôt que l’affrontement permanent. Cette attitude, ses résultats, peuvent paraître contrastés. Sur la question du Proche- Orient, faute d’interlocuteurs, on ne peut pas dire que le processus de paix, malgré l’engagement affiché par Washington, est plus avancé aujourd’hui. C’est un échec, mais qui ne peut être imputé à l’administration Obama, seule. Le contexte régional, les développements à l’intérieur d’Israël et chez les Palestiniens, contrecarrent tout projet de négociations sérieuses en vue de la solution des deux Etats. Par contre, l’histoire retiendra que tout en étant ferme sur les principes, l’actuel président des USA a réussi à établir des rapports sains avec la Russie de Poutine, ce qui permet, discrètement, d’entrevoir aujourd’hui une solution politique en Syrie, et ce qui a permis auparavant de désamorcer, très relativement, la crise ukrainienne et ce malgré les surenchères européennes. Obama a aussi montré de l’intérêt au continent africain, au-delà des questions stratégiques, et a mis en place des programmes de coopération visant le co-développement, une meilleure gouvernance, le soutien aux processus de démocratisation. L’histoire retiendra aussi qu’il a ramené les «boys» à la maison, d’Irak et d’Afghanistan, sans réduire l’influence de l’Amérique, qu’il a amélioré l’image de ce pays, qu’il a pacifié les relations avec l’Iran sans rien céder sur le nucléaire. Il a succédé à George Bush et sa guerre des civilisations, aussi coûteuse que funeste. Quand on voit ce qu’est Donald Trump, les divisions et les peurs qu’il suscite, on se dit que l’Amérique qu’on préfère est celle d’Obama, qui met sa puissance au service de la paix, et non pas l’Amérique de Trump, qui n’est en rien représentative du rêve américain, de la Nation de la liberté.