La sale guerre

Facebook bouillonne en ce moment. Une vidéo circule montrant, dit-on, le ministre des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar, dans une boîte de nuit où l’alcool coule à flot. Ce n’est pas étonnant de constater que ce sont les comptes des islamistes proches du parti de la Justice et du Développement qui s’y intéressent le plus. Et il y a une raison à cela. L’auteur de la vidéo prétend que le Conseiller royal Fouad Ali Al Himma est lui aussi de la fête. Il ne cesse de le répéter. Or, aucun passage de la vidéo ne permet de le distinguer. Il n’y était pas. Que cherchent-ils donc au juste ? Est-ce là leur réponse au discours du Trône dans lequel le Roi appelle au respect des institutions ?

Les brigades facebookiennes proches du PJD, parti qui mène le gouvernement actuel, commettent une grave erreur. Si elles croient renforcer les chances du PJD pour les prochaines élections, elles risquent de déchanter. S’attaquer à la vie privée des personnes n’a jamais fait partie des traditions marocaines, en politique encore moins. Et c’est une action qui peut avoir de graves conséquences non seulement sur les islamistes mais sur la politique en général.

C’est rabaisser la politique à un niveau qui n’honore pas le pays. C’est aussi commettre un acte qui peut être interprété comme du terrorisme politique. Contrairement à ce que pourraient penser ces acteurs des réseaux sociaux, aucun parti ne peut tirer profit de telles pratiques, quand les citoyens l’attendent sur le bilan économique et social.

Or sur ce terrain là, les islamistes savent qu’ils sont perdants sur tous les sujets. Le mandat de Abdelilah Benkirane n’est pas beau à voir ses « frères » du parti le savent très bien.

Les ménages moyens et pauvres ont souffert du fait de la suppression des subventions, ils vont encore souffrir quand ils commenceront à toucher leurs premières pensions de retraite dans quelques années.

Dans le domaine des comptes publics, le déficit budgétaire s’est creusé dangereusement et le déficit de la balance commerciale s’aggrave de mois en mois. Pour corser les choses, l’endettement a atteint des sommets jamais atteints auparavant.

Dans ce contexte, que peuvent faire les brigades facebook ? Rien. Ou plutôt, si. S’attaquer aux personnes, aux « crocodiles » et aux « fantômes » afin de montrer que seuls les membres du PJD sont honnêtes à l’exclusion de tous les autres. On remarquera que ce ne sont pas toujours des acteurs inconnus qui commentent la vidéo. Des membres connus du PJD et du Mouvement Attawhid Walislah participent également à ce lynchage médiatique.

Il y a un moment où il faut dire « trop c’est trop ». C’est grâce au processus démocratique que le PJD est arrivé au pouvoir avec l’aide de partis alliés, et c’est justement cette démocratie qu’il est en train de rabaisser par ses manœuvres politiciennes. Il est e train de scier la branche sur laquelle il est assis.

Plus encore, parfois, cela devient du pur terrorisme, comme lorsqu’un membre du PJD conseille de couper les têtes de tous les modernistes. Ce monstre politique qui dévalorise la politique et transforme le jeu normal de la compétition en vue des élections en un marigot de voyeuristes qui s’attaquent à tous les adversaires politiques.

Ces pratiques ont fini par convaincre les citoyens que les brigades son aux abois et qu’elles ne trouvent pas d’arguments solides à présenter aux citoyens.

Leur rage s’est encore accentuée lorsque le Roi Mohammed VI a honoré Abderrahman Youssoufi en donnant son nom à un des plus grands boulevards de Tanger. On a lu des commentaires disant qu’au départ, le boulevard allait recevoir le nom de Benkirane et que les crocodiles, avec la complicité des fantômes peut-être, avaient décidé en faveur de Youssoufi. Au lieu de glorifier Benkirane, cela porte un coup fatal à sa personne. On l’a fait apparaître comme quelqu’un qui quémande la reconnaissance royale.

C’est vraiment la sale guerre que mène le PJD dans un pays qui lui a donné toutes les chances et qui les a ratées, toutes.

C’est d’autant plus dangereux que les brigades du PJD ne disent rien quand il s’agit des mauvaises pratiques de leur « frères » du parti et les exemples ne sont pas rares. Les frasques de Choubani, les pratiques douteuses du maire de Rabat, et puis l’acharnement du chef du gouvernement à dévaloriser l’enseignement public au profit de l’enseignement privé dont il est un des promoteurs. Cela les brigades du PJD ne le disent pas.