Les institutions d’abord
Ahmed CHARAI

L a décision du Conseil national du parti de l’Istiqlal de se retirer du gouvernement, en laissant au comité exécutif la gestion de cette sortie, est un véritable événement politique. Il a été précédé d’une bataille de tranchées, peu reluisante, entre le PJD et son allié. L’institution monarchique a jusqu’ici respecté la constitution à la fois dans son esprit et dans sa lettre. Le Roi ne s’immisce pas dans les affaires partisanes, mais il est le garant de la bonne marche des institutions. L’éclatement de la majorité est souvent présenté comme une lutte entre deux hommes, impulsifs, préférant le recours à un discours populiste. C’est faux. La coalition gouvernementale bute sur un problème objectif qui s’appelle la crise.

Apparemment, elle a perdu toute homogénéité face à cette donne et son programme gouvernemental, sur la base duquel elle a été investie au parlement, est caduc. Politiquement, nous sommes face à une réalité dénaturée. Le PJD est sorti premier parti des élections, largement, mais il est loin de la majorité. Seul un électeur sur cinq a voté islamiste. Et encore ! Faut-il rappeler que la majorité des inscrits ne se sont pas déplacés et que trois millions de Marocains n’ont pas estimé utile de s’inscrire. Ces réalités doivent être rappelées pour relativiser les choses

. Le PJD est légitime pour diriger le gouvernement, mais il ne peut ni numériquement au parlement, ni politiquement, se prétendre le représentant du peuple marocain dans son ensemble. La crise actuelle relève du jeu démocratique. Même dans les démocraties les plus installées, les coalitions peuvent s’effondrer, sauf que c’est la qualité du débat public qui fait la différence. Les « affarites » et « Bouya Omar » dénaturent le débat, désarment le citoyen face aux vraies lignes de clivage et l’incitent à se détacher de la vie politique et donc à ne pas voter. Le vrai problème c’est que l’acte fondateur de l’alliance gouvernementale est caduc. Le gouvernement est obligé d’appliquer une politique qui n’a rien à voir avec le programme sur lequel la représentation nationale l’a investie.

C’est un vrai problème de démocratie. La seule solution viable, c’est la refonte d’une coalition sur la base d’un programme gouvernemental nouveau, approprié à la crise et qui doit être adopté par le parlement. Il s’agit là de respecter les institutions représentatives et au-delà, le contrat entre les électeurs, les élus et l’exécutif censé représenter les options de la majorité. Les scénarios politiciens ont chacun sa pertinence. Mais, à notre avis, le plus important est ailleurs. La constitution démocratique est en danger. Ce n’est qu’en respectant les institutions et en élevant le niveau du débat public qu’on évitera l’échec. Il faut un nouveau programme gouvernemental assumé par l’alliance et voté par la majorité. посуда фирмы