Entretien - Paula Zumeta: «Le Maroc représente le contrepoint parfait à l’extrémisme iranien»

Les velléités expansionnistes du régime iranien ne trompent plus personne. Sa main dans la déstabilisation de la région moyen-orientale est plus qu’avérée et Téhéran s’active en allant plus loin, notamment, en Afrique. Paula Zumeta explique les leviers de ce régime tout en évoquant le rôle que peut jouer le Maroc pour le contrecarrer dans la région.

L’Iran est un pays qui veut exporter sa révolution vers d’autres pays pour se faire des alliés et échapper aux sanctions internationales. Quels sont les vrais dangers de cette expansion iranienne ?

Le régime iranien est le principal sponsor du terrorisme. Il soutient militairement et financièrement des groupes rebelles sous différentes latitudes tout en créant de nouveaux groupes terroristes. Quelles que soient les sommes que d’autres gouvernements consacrent aux ressources pour lutter et éradiquer les organisations terroristes, le régime iranien en créera de nouvelles. Et lorsque l’un de ces groupes sera éliminé, Téhéran trouvera le moyen de préparer et financer d’autres groupes terroristes pour promouvoir son agenda.

L’expansion de l’influence iranienne est plus dangereuse que celle d’un groupe terroriste parce que les dirigeants politiques et militaires du régime jouissent de la légitimité d’un système d’État-nation approuvé par les Nations Unies. Ceci en dépit du fait que le régime n’est ni une démocratie ni représentant de toute la nation iranienne. En conséquence, les interventions militaires et les crimes contre l’humanité commis par le Corps des Gardiens de la Révolution Islamique (CGRI), la Force Al Qods et ses milices accros dont notamment le Hezbollah au Liban et Ansar Allah au Yémen attirent moins l’attention car ils opèrent sous la «légitimité» d’un Etat souverain.

Si cette expansion devait se concrétiser, nous verrions un Moyen-Orient troublé, rongé par davantage de guerres civiles, ouvrant la porte à la propagation de l’islam radical dans la région pour se consolider ensuite rapidement en Occident.

L’Iran cible des pays faibles, notamment en Afrique, au Moyen-Orient et en Amérique Latine. Quels sont les canaux que ce pays utilise pour mener ses opérations ?

L’Iran défend sa présence et son influence dans ces pays à travers une stratégie en trois phases. Il s’agit en premier lieu de tisser des relations au niveau gouvernemental. Une approche qui consiste à l’établissement d’une coopération officielle sur le plan économique et culturel, mais qui implique également d’autres volets plus sensibles tels que des projets conjoints sur le plan militaire et du renseignement. Deuxièmement, Téhéran tient à renforcer ses liens avec les communautés islamiques de la région, en soutenant et en y nourrissant la radicalisation. Enfin, la dernière phase consiste à adopter une approche entièrement clandestine où les agents des services secrets iraniens collaborent avec les espions du Hezbollah dans ces pays. à ce niveau, la création des liens avec des organisations terroristes et criminelles n’est pas inhabituelle. En effet, ces dernières années, une série de liaisons ont été mises à nu entre une organisation de trafic de drogues et les réseaux du Hezbollah.

Comment peut-on faire face à cette politique iranienne, surtout en Afrique?

Premièrement, il est impératif de durcir à nouveau les sanctions économiques qui ont amené l’Iran au bord de l’effondrement. Grâce aux sanctions économiques, l’Iran s’est vu contraint de demander des négociations. Il a même proposé d’arrêter son programme nucléaire en dépit de ses déclarations précédentes selon lesquelles de telles mesures constituent une violation de la souveraineté de l’Iran. En fin de compte, le régime iranien a accepté de s’asseoir autour de la table et de négocier son programme nucléaire avant de signer l’accord. Mais il s’est avéré que les négociateurs occidentaux, à l’époque, ont approuvé un accord hâtif et déficient.

Cependant, cet accord a donné à l’Iran assez d’oxygène pour reprendre sa politique militariste et expansive. Par conséquent, il est essentiel de revenir à un accord restrictif.

En Afrique, en particulier, il est important de renforcer les relations avec les pays capables de faire face à la fois à l’Iran et à l’islam radical. En ce sens, le Maroc représente le contrepoint parfait à l’extré- misme iranien.

L’Iran soutient financièrement et militairement le polisario contre le Maroc, à travers le Hezbollah libanais via l’ambassade algérienne, quelle analyse faites-vous de ces faits ?

Il est logique que l’Iran tente de déstabiliser le Maroc. C’est le seul pays qui peut y faire face. Le royaume est une enclave stratégique qui unit l’Afrique, l’Europe et les États-Unis. Si l’Occident veut éviter un plus grand mal, il devrait se positionner aux côtés du Maroc et renforcer les sanctions contre l’Iran pour ce comportement inacceptable, et demander des explications formelles à l’Algérie sur sa participation à ce boycott.