Enseignement supérieur privé: La débâcle
Ahmed Charai

Chaque année des dizaines de milliers de familles se retrouvent face au même problème. Un bachelier qui n’a pas les moyennes stratosphériques pour intégrer les filières d’excellence et qui n’a pas envie d’aller à la faculté n’a qu’un seul choix, celui des écoles privées. Il faut savoir, qu’en moyenne, ces écoles ont un prix équivalent à trois fois le SMIG. La classe moyenne accepte le sacrifice, mais pour quel résultat ? Des ‘’ingénieurs’’ finissent dans les call-centers pour un salaire qui n’atteint même pas ce que leurs parents payaient à l’Ecole. Le niveau est très contesté par les recruteurs. Qui en est responsables ? L’Ecole publique étant en faillite, l’Etat a laissé prospérer le système privé. Celui-ci devait, en théorie, tirer vers le haut, offrir des formations solides et permettre une meilleure adéquation avec le marché du travail. Ce choix est partiellement un échec, non pas en soi, mais pour une question de gouvernance.

Le père d’un bachelier doit décider en fonction de plusieurs paramètres. Les désidératas de son fils, ses moyens, mais aussi la qualité de l’enseignement et les débouchés derrière. Il a accès à la seule publicité des écoles.

C’est une question de gouvernance parce qu’il faut que l’Etat puisse contrôler au plus près le contenu de la formation. Ensuite, il faut absolument établir des labels de qualité, des statistiques, des classements, comme cela se pratique un peu partout. De toutes les ‘’Business-schools’’ laquelle est la plus performante ? Quels sont les lauréats ayant réussi une carrière fracassante ? Quel est le niveau moyen des salaires de ses lauréats ? Voilà les questions que les parents se posent, sans possibilité de réponse.

Les autorités ne peuvent pas se complaire face à ce maquis qui n’est en rien productif, qui est anxiogène socialement et qui produit de la déperdition de potentialités. Les moyens existent pour contrôler la qualité de la formation, évaluer les diplômes et surtout afficher les statistiques afférentes aux lauréats dans le monde du travail.

Le libéralisme s’est construit autour de l’idée que le marché s’auto-régule, à condition que le consommateur dispose de toute l’information. La transparence est une condition sine qua non du marché. Or, les familles, qui sont le consommateur, n’ont aucune information fiable sur les écoles privées.

C’est aux pouvoirs publics de remédier à cette situation en mettant en place un système d’évaluation et de classement, en fonction de critères objectifs. L’Eco-système du privé y gagnera parce que la concurrence sera plus loyale, que les meilleurs ne seront pas tenus par les prix, les parents seront aidés dans leur choix et les élèves seront plus rassurés sur leur avenir.