MRE : Quels apports pour l’économie ?

«Impossible de concevoir une dynamique économique sans la contribution des MRE », lance d’emblée le ministre chargé des Marocains résidant à l’étranger et des Affaires de la Migration, Abdelkrim Benatiq, au sein de la Chambre des conseillers.

En effet, aujourd’hui, on compte quelques 5 millions de MRE. Selon une enquête de l’OCDE, ils sont essentiellement concentrés dans dix pays, principalement européens. Un tiers réside en France. L’Espagne et l’Italie accueillent, à eux deux, plus d’un million d’émigrés marocains, deux fois plus qu’en 2000/2001. Si la majorité des émigrés marocains a encore un niveau d’éducation faible, ce constat est en train de changer. Un demi-million d’émigrés marocains détiennent un diplôme de l’enseignement supérieur, deux fois plus qu’en 2000/01.

Des transferts de fonds, mais pas uniquement...

La diaspora marocaine, grandissante, hétérogène et dynamique représente une ressource majeure pour l’économie marocaine. Les retombées ne se limitent pas aux seuls aspects budgétaires comptables et domestiques mais impliquent aussi, et surtout, les effets multiplicateurs indéniables sur l’ensemble de l’économie nationale et locale. Parmi tous les pays d’origine des immigrés vivant en Europe, le Maroc apparait comme celui qui bénéficie le plus des flux financiers issus de l’émigration.

A un niveau macro-économique, l’étude des retombées économiques de l’émigration implique donc la question centrale des transferts monétaires en devises fortes, dont le produit est considéré comme un facteur d’équilibre dans les échanges du pays avec l’extérieur. Ainsi, les transferts des MRE ont enregistré une progression remarquable au cours des dernières années, avec une accélération considérable durant la dernière décennie.

En chiffres, durant l’année 2017, les transferts ont totalisé 65,4 milliards de DH, contre 62,5 milliards une année auparavant ce qui équivaut une hausse de 13% soit le niveau le plus haut de ces six dernières années. Ils ont permis de couvrir 64% du déficit commercial. A fin mai 2018, les transferts des MRE s’élèvent à 26,80 milliards de DH, soit une hausse de 9,7% par rapport à la même période de 2017.

Selon le ministre, en plus des ressources financières, les Marocains du monde sont une valeur ajoutée pour tout projet sociétal, vu les connaissances et l’expérience qu’ils ont acquises dans les pays de résidence. Or, en dépit des transferts jugés importants, seul 7,7% du total est orienté vers l’investissement. Et pour cause, 71% sont absorbés par la consommation.

Les activités financières les plus courantes parmi les ménages recevant des transferts de fonds sont les investissements immobiliers (35% des ménages dans les zones rurales et 46% dans les zones urbaines), suivis du paiement d’un traitement médical pour un membre du ménage, de l’acquisition d’une maison et de l’épargne.

Néanmoins, selon une étude de la Fondation Hassan II pour les MRE, ce sont les retombées micro-économiques qui apparaissent les plus intéressantes à mettre en évidence. Ces transferts contribuent à la formation des revenus des ménages et jouent un rôle capital dans la survie de plusieurs familles au Maroc. « Dans les régions où les ressources sont moins diversifiées, la part des envois d’argent des émigrés dans le revenu des manages est encore plus importante. On peut mesurer l’ampleur des implications au moins au moyen terme de tout tarissement de cette source de revenus sur l’équilibre économique et social des régions concernées », note cette même étude.

Profils

Selon l’enquête de l’OCDE, les hommes sont plus nombreux que les femmes (86% contre 14%). Le nombre d’émigrées marocaines ayant un niveau d’éducation élevé a augmenté de 125 % pendant la dernière décennie, une augmentation plus rapide que celle observée chez leurs homologues masculins.

Par ailleurs, les descendants d’immigrés marocains sont plus diplômés que leurs parents : plus de 31 % de descendants d’émigrés marocains en Europe (250.000) détiennent un diplôme de l’enseignement supérieur. La quasi-totalité des émigrés actuels dans le cadre de l’étude sont en âge de travailler (15-64 ans). Les personnes âgées de 15 à 44 ans représentent près des trois quarts des émigrés actuels. Quelque 75% des émigrés étaient économiquement actifs au Maroc avant de quitter le pays: 48% exerçaient un emploi et 27% étaient au chômage.

En général, les migrants transfèrent des fonds à leur famille au Maroc. Lorsque ces fonds sont consacrés à la création d’une entreprise, le phénomène peut générer de l’emploi. Des études ont montré que les transferts de fonds pouvaient atténuer les contraintes financières et permettre aux ménages d’investir dans le capital humain.

Les migrants de retour peuvent rapporter des fonds, des compétences entrepreneuriales et des réseaux utiles dans leur pays d’origine. D’après l’enquête menée auprès des ménages par l’OCDE, la propriété d’une entreprise ou d’un bien foncier (terrain non agricole et maison/appartement autre que la maison/l’appartement où vit le ménage) est très faible. Seul 1% des ménages de l’échantillon (24 ménages) déclare être propriétaire d’une entreprise. Cette proportion est supérieure parmi les ménages ne recevant pas de transferts de fonds et sans migrant de retour. Un ménage sur cinq détient un terrain non agricole et 4% sont propriétaires d’une maison autre que celle dans laquelle vit le ménage.

Si on veut attirer les investissements des MRE, il faut multiplier et diversifier les offres, car ailleurs elles sont beaucoup plus attractives.

De son côté, le ministère chargé des MRE a mis en place un dispositif d’appui aux porteurs de projets d’investissement. Il consiste en la mise en place d’une cellule dédiée à leur accompagnement. Sa mission est d’informer et orienter les investisseurs potentiels sur les différents secteurs de l’économie, d’assister les porteurs de projets durant toutes les étapes de réalisation, de la conception à la concrétisation.