L’Egypte ou l’échec des « frères »
Ahmed CHARAI

La situation est explosive en Egypte. L’armée a déposé Morsi. La Justice était en guerre contre ses décisions. Six ministres, parmi les plus importants, avaient démissionné avant son départ et cinq gouverneurs en ont fait de même. En face, il y a une opposition résolue qui arrive à mobiliser des millions de manifestants, pour qui la seule revendication est le départ du Président. Il est vrai que ses soutiens restent nombreux et que le pays est réellement divisé. Il ne s’agit pas ici de devancer les événements en tirant des plans sur la comète par le biais de pronostics qui ne peuvent être qu’hasardeux.

Ce qui est sûr, c’est que le mouvement des frères musulmans a réussi, en un an, à cimenter une opposition, dont la partition et la faiblesse organisationnelle ont participé à ses succès électoraux, de manière décisive. Ce qui est vrai aussi, c’est que les islamistes, face à l’exercice démocratique du pouvoir, s’essoufflent et égratignent largement le crédit qu’ils avaient acquis, par les urnes, à l’issue des convulsions appelées « Printemps arabe ». C’est aussi vrai pour la Tunisie qui vit des tumultes moins fracassants, mais tout aussi profonds. La contestation laïque se structure. Au sein du parlement, les négociations sur le projet de constitution sont l’occasion d’un vrai clivage.

La seule différence c’est que les alliés d’Ennahda, au sein de la majorité en particulier, et le Président Marzouki sont attachés à une issue consensuelle. C’est une tendance lourde qui remet en cause les pouvoirs islamistes en démocratie. Les USA opèrent un véritable changement de braquet. Si Obama a signifié son attachement au processus démocratique en Egypte, au règlement politique, il a aussi précisé « qu’en démocratie, il faut aussi écouter le peuple ». Une manière d’appeler les frères musulmans à abandonner la tentation hégémonique. Les modèles islamistes s’essoufflent, s’effondrent même, parce qu’ils ont cru que le suffrage universel leur donnait la légitimité pour abattre les fondements même de la démocratie.

C'est-à-dire la neutralité de l’administration, l’indépendance de la justice, les libertés publiques et individuelles. L’accélération de l’histoire dans la région fait que cela a cimenté rapidement des oppositions fortes. S’ajoute à cela l’échec sur le plan de la gestion et l’aggravation des problèmes sociaux tels que le chômage, la pauvreté, la précarité. Le Maroc est-il en retrait par rapport à cette tendance ? Il est assez paradoxal de constater que s’il y a une exception marocaine, elle est dans les formes pas sur le fond. Il n’y a pas de contestation dans les rues, mais le PJD a épuisé son pain blanc. Son principal allié s’en détache, ses tentatives d’imposer les siens aux postes clés de l’administration choque au plus haut point, ses discours sur la prévarication et les poches de résistance ne porte plus et les résultats de sa gestion économique sont catastrophiques.

Sur le plan institutionnel, la monarchie est le garant de l’ordre constitutionnel. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre, celle de la recherche de consensus nationaux fondateurs, pour la construction de démocraties avancées. Les islamistes, y auront leur place, s’ils acceptent l’idée que la démocratie n’est pas juste un moyen de conquérir le pouvoir, mais aussi une organisation de la société, autour de valeurs consensuelles indépendantes des élections. продвижение сайта на яндексе