France
France. La grande misère des palais de justice

Le malaise des magistrats, des avocats et des greffiers est profond. Voici comment ils décrivent leur situation: "La réalité du terrain, ce sont toujours des audiences surchargées (...), des délais au-delà du raisonnable, des jugements non expliqués ». Cette description a été faite par 19 syndicats et organisations de magistrats, d'avocats ou de conseillers d’insertion qui appellent à « renvoyer toutes les audiences ».
Selon l’AFP, des rassemblements doivent également avoir lieu dans la journée, notamment à Paris devant le tribunal judiciaire à 12H00, pour dire le ras-le-bol d'une profession qui reste, selon les syndicats de magistrats, confrontée à une « charge de travail titanesque ».
Il y a tout juste un an, la tribune signée par 3.000 d'entre eux et publiée dans le Monde avait créé un électrochoc et alerté sur les conditions de travail d'une institution rongée par une « grave perte de sens ». Ecrit après le suicide d'une jeune collègue, le texte a aujourd'hui été paraphé par près de 8.000 magistrats, auditeurs de justice et greffiers.
Lancées par le gouvernement, les consultations des Etats généraux de la justice ont conforté ce diagnostic en concluant à "l'état de délabrement avancé" de l'institution, auquel le ministère a tenté de répondre en décrochant, pour 2023, une troisième hausse consécutive de 8% de son budget annuel.
Logique de stocks
"Avec ce budget de presque 10 milliards d'euros, le ministère de la Justice poursuit son changement de dimension avec des moyens à la hauteur de ses missions", avait estimé fin septembre le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, qui doit bientôt dévoiler un nouveau plan d'action.
L'exécutif s'est par ailleurs engagé à recruter 8.500 magistrats et personnels de justice supplémentaires d'ici à la fin du second quinquennat Macron et a annoncé une hausse de salaire de 1.000 euros mensuels en moyenne pour les juges judiciaires.
« Si des recrutements de magistrats et de fonctionnaires de greffe sont prévus pour 2023, ils sont largement insuffisants et aucun plan d'action clair n'a été défini comme l'exigerait pourtant l'urgence de la situation », répliquent les professionnels. Et le Conseil de l’Europe les conforte dans leur certitude. Pour cette institution européenne, la France alloue moins de crédits à la justice que ses partenaires européens à PIB comparable: elle y consacrait 72,50 euros par habitant en 2020, contre 82,20 euros en Italie, 88 en Espagne ou 140,70 en Allemagne.
Selon les syndicats, les professionnels de la justice restent en proie à une perte de sens tandis que les justiciables sont réduits à l'état de « dossiers » et de « stocks".
Avec AFP